Madame Bovary, de Flaubert

madame-bovaryCela fait un long moment que je n’ai pas posté d’avis lecture ici. Il faut dire qu’avec les lectures internes du Prix du Jeune Écrivain, la reprise intensive du sport et un peu de fatigue (merci le changement d’heure)… je n’ai pas beaucoup lu. Un seul roman en mars ! Mais quel roman ! Un bon classique comme je les aime, que j’avais découvert en fac de lettres : Madame Bovary de Flaubert.

Emma, ah Emma… ! Emma vit dans ses romans, elle aimerait que sa vie soit aussi romanesque. Elle épouse donc ce médecin Charles, en espérant une vie faite de péripéties… Mais cette fille de paysan découvre que son nouveau mari est bien ennuyeux, même s’il est fou amoureux d’elle. Emma rêve d’une existence plus palpitante, moins provinciale. Les hommes, elle trouvera un échappatoire avec les hommes. Elle est belle, elle veut être amoureuse… l’adultère lui tend les bras. Emma est, à mes yeux, amoureuse de l’amour, ou plutôt amoureuse de la passion. Elle aime frémir de désir, elle aime vivre dangereusement, elle aime être aimée.

Je peux comprendre que ce livre ait choqué à sa sortie en 1857, la société était alors bien différente de la nôtre. Mais même aujourd’hui, je ne peux m’empêcher d’être agacée par l’héroïne. Elle ment, elle utilise les autres, elle blesse son entourage. Charles est pourtant un mari aimant qui ferait tout pour elle. Malgré ça, j’ai adoré suivre Emma dans sa vie, je me suis passionnée pour ses aventures, son quotidien même si j’aurais bien aimé lui faire la morale ! Les pages défilent vite et il y en a plus de 400 !

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Il faut dire que Flaubert est vraiment un romancier incroyable. Il a un sens de la formule qui en fait conteur hors pair. Des descriptions précises, des dialogues bien choisis, des personnages dessinés avec justesse, un rythme maîtrisé de bout en bout. On a beaucoup à apprendre de Flaubert : chaque mot est choisi avec précision et, même à notre époque, je trouve cette langue coulante, naturelle. J’ai redécouvert l’auteur à travers cette lecture et j’ai hâte de me mettre à lire ses correspondances – j’ai beaucoup entendu parlé de son ton mordant et sans détour !

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Je ne peux que vous encourager à (re)découvrir Madame Bovary et plus largement tous ces classiques de la langue française : de belles surprises vous attendent.

Le Hobbit, de J. R. R. Tolkien (lecture commune de septembre 2017)

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Les lectures communes sont pour moi l’occasion de me plonger enfin dans l’œuvre d’auteurs cultissimes que je n’ai toujours pas découvert. Ce mois-ci, j’ai donc lu Le Hobbit de J. R. R. Tolkien. J’avais ouïe dire que c’était l’idéal pour commencer avec cet écrivain : ce roman est en effet destiné à la jeunesse, il est vivant, assez court en comparaison des gros pavés qui suivent, sans compter que chronologiquement c’est ici que commence l’histoire de l’anneau.

Je vais vous demander d’ignorer les films qui correspondent à ce roman. Pitié. Même si l’adaptation au cinéma reprend pas mal d’éléments de l’intrigue, toutes ressemblances s’arrêtent là. Bilbo Bessac vit tranquillement sa vie de hobbit dans sa maison sous la colline quand il voit cette dernière envahie par une dizaine de nains, invités sans son autorisation par le magicien Gandalf. Bon gré, mal gré, il se voit bien obligé de les accueillir, d’écouter leurs récits et leurs chansons. Il finit alors par comprendre que ces nains vont partir pour un long périple jusqu’à la Montagne solitaire. C’est en effet à l’intérieur de cette montagne que leur immense trésor est caché. C’est le dragon Smaug qui garde farouchement et égoïstement ces richesses qui reviennent de droit aux nains. L’héritier légitime, Thorin Lécudechesne, veut retrouver sa place de Roi sous la Montagne. Et notre Bilbo a été désigné comme le dernier membre de la troupe : il sera le cambrioleur.

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Au fond d’un trou vivait un hobbit. Non pas un trou immonde, sale et humide, rempli de bouts de vers et de moisissures, ni encore un trou sec, dénudé, sablonneux, sans rien pour s’asseoir ni pour se nourir : c’était un trou de hobbit, d’où un certain confort. […] Ce hobbit était un hobbit fort bien nanti, et il s’appelait Bessac. Les Bessac habitaient les environs de la Colline de temps immémorial, et ils étaient vus comme des gens très respectables, non seulement parce que la plupart d’entre eux étaient riches, mais aussi parce qu’ils ne partaient jamais à l’aventure et ne faisaient jamais rien d’inattendu : on savait ce qu’un Bessac dirait de telle ou telle chose sans être obligé de lui poser la question. Cette histoire raconte comment un Bessac se trouva mêlé à une aventure, à faire et à dire des choses tout à fait inattendues. Il a peut-être perdu le respect de ses voisins, mais il a gagné… enfin, vous verrez s’il a gagné quelque chose à la fin du compte.

 

A ma grande surprise, j’ai beaucoup aimé cette histoire. Il s’agit là vraiment d’un roman destiné à la jeunesse et même s’il a été publié il y a soixante-dix ans, ce livre garde tout son intérêt et sa modernité – sans compter qu’il est servi par une très bonne traduction. Le voyage est périlleux, nos héros vont croiser des gnomes, des trolls, des portes magiques. Ils vont découvrir des paysages désertiques, des grottes obscures, des villes étranges. Je me suis beaucoup attachée à cette troupe de personnages, mais je regrette de ne pas mieux les connaître : ils sont en effet quatorze ! Pour la plupart, ils passent inaperçus et j’avoue ne pas avoir compris ce choix. Pourquoi mettre autant de héros ? Le lecteur se perd dans cette multitude !

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Les aventures traversées par les nains et le hobbit sont très divertissantes et originales, on ne s’ennuie pas une minute. J’ai tout de même trouvé que certaines péripéties n’étaient pas… héroïques. J’ai eu de temps en temps du mal à comprendre les choix de l’auteur en terme d’histoire. C’est parfois assez brouillon ou ennuyeux, on ne sait pas quoi en penser, on ne comprend pas où l’auteur veut nous emmener. Concernant l’écriture, elle est très fluide : le vocabulaire est simple, le style direct. Cela nous permet de rentrer directement dans l’univers de Tolkien et de découvrir cette histoire. Je vous invite donc à essayer cette lecture, c’est vraiment l’idéal pour commencer !

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J. R. R. Tolkien, Le Hobbit, traduit de l’anglais par Daniel Lauzon, aux éditions Le Livre de Poche (33837), 6€.

Du côté de chez Swann, de Marcel Proust

FC_Proust-Du cote.inddIl y a un auteur, un classique, que j’avais envie de découvrir depuis très longtemps. Je n’étais peut-être pas prête avant, mais en tant que lectrice, j’ai mûri depuiss. J’ai donc décidé, chaque été, de lire du Marcel Proust. Parce que je savais très bien que sa Recherche du Temps perdu est une œuvre que se déguste lentement. Pour moi, l’idéal est donc vraiment de lire un roman par an, au moment des grandes vacances, quand j’ai beaucoup de temps, peu d’obligations. Exceptionnellement, je me permets alors de lire plusieurs choses en même temps : Proust et d’autres romans plus actuels et expéditifs. Ainsi, j’ai eu l’occasion ces dernières semaines de tester cet équilibre très agréable entre des lectures addictives qui me permettaient en plus d’alimenter mon blog, et une découverte littéraire douce qui m’a accompagnée et bercée pendant tout l’été. Aujourd’hui, on va donc parler Du Côté de chez Swann, premier volet de la Recherche.

C’est un long roman – au bon sens du terme – qui se divise en trois parties : Combray (de très loin ma préférée), Un amour de Swann et Noms de pays : le nom (une partie très courte qui est la suite des deux autres et dont je ne vais pas parler). On rencontre tout d’abord notre narrateur, celui que l’on va suivre tout au long de la Recherche. Il est jeune et vit à Combray. C’est un enfant qui veut seulement que sa mère adorée l’embrasse le soir avant d’aller dormir. Il a des désirs simples mais tellement vrais. Il découvre la littérature, mais ce qu’il préfère surtout ce sont les promenades. Celle du côté de Méséglise est presque quotidienne. C’est par là que vit monsieur Swann, pour lequel le narrateur va avoir une sorte de fascination. De l’autre côté, on ne peut y aller que s’il fait très beau, car la ballade est beaucoup plus longue. Au bout de ce chemin vivent les Guermantes, symbole de la haute société que l’enfant voudra à tout prix intégrer plus tard. Dans la deuxième partie, on s’éloigne de la vie de notre narrateur pour rejoindre celle de ce fameux Swann. On découvre les salons de Combray, notamment celui de madame Verdurin où Swann passe du temps. Il a une aura mystérieuse, on dit qu’il côtoie les plus grands. Mais c’est pourtant dans ce salon assez modeste qu’il va rencontrer Odette. Et en tomber amoureux.

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Brouillon de Proust

Je ne vais pas en dire plus sur l’histoire car j’ai l’impression de rendre tout cela complètement inintéressant avec mes mots… Je suis loin d’être à la hauteur de Proust et retranscrire ce qu’on peut ressentir à la lecture d’une de ses œuvres est assez ardu. Quand on pense « style de Proust », on pense « phrases interminables ». Alors, oui, je ne vais pas nier qu’il y a des phrases très longues. Mais entre la majuscule du tout début et le point final, un monde s’ouvre à vous, rythmé par la ponctuation, les discours directs, les parenthèses… Cela n’est pas ennuyeux, le lecteur n’est pas perdu dans une marée de mots. Car Proust, même s’il est d’une douceur incroyable, vous emmène là où il veut. Il y a des digressions régulièrement, mais on ne lui en veut pas du tout, au contraire : on le suit dans cette barque qui vogue sur les mots. On s’attache fort aux personnages, sans même s’en rendre compte et connaître leurs vies, leurs habitudes, leurs mondes est passionnant.

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Si vous êtes un lecteur pressé, qui veut de l’efficacité, il serait facile de vous dire d’éviter Proust, car cela ne vous conviendrait pas. Mais personnellement, j’ai plutôt envie de vous encourager à essayer : persévérez pendant une cinquantaine de pages, histoire que Proust ait le temps de vous insuffler la tranquillité d’esprit propre à son style. Ce seront de vrais vacances pour vous, quittez cette urgence, cette boulimie de lecture, et prenez enfin le temps ! Laissez-vous bercer par la plume profonde et poétique de cet auteur. Rarement, j’ai vu une langue aussi belle. Dès les premiers mots, je savais que j’aimerais : ma première lecture depuis longtemps qui me fait dire « Ah mais oui, c’est vrai ! La langue française est sublime ! ».

[…] Un jour, ma mère, voyant que j’avais froid, me proposa de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je refusais d’abord, et, je ne sais pourquoi, me ravisai. Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui semblent avoir été moulés dans la valve rainurée d’une coquille de Saint-Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain, je portais à mes lèvres une cuillerée de thé où j’avais laissé s’amollir un morceau de madeleine. Mais à l’instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d’extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m’avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m’avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu’opère l’amour, en me remplissant d’une essence précieuse : ou plutôt cette essence n’était pas en moi. J’avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel. D’où avait pu me venir cette puissante joie ? Je sentais qu’elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu’elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature.

Je sais bien que je vous vends bien mal ce monument de la littérature. Je ne peux donc que vous conseiller, avec tout mon cœur, de découvrir cette œuvre incroyable.

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Marcel Proust, Du côté de chez Swann, aux éditions folio classique, 7€70.

Raison et Sentiments, de Jane Austen (lecture commune d’août 2017)

9782264023810Au début du mois, je me disais « Pfff, la lecture commune d‘août, ça me tente pas… » En effet, au premier abord, lire un bouquin anglais d’une autre époque, ça ne m’emballait pas vraiment. Et puis je me suis souvenue que j’avais littéralement adoré mes autres lectures de Jane Austen. Et la magie est réapparue, je me suis plongée corps et âme dans Raison et Sentiments et quel bonheur !

Le roman débute par la mort de M. Dashwood. Il laisse sa femme et ses trois filles aux bons soins de son fils, issu d’un précédent mariage. C’est sans compter sur la femme de l’aîné, qui ne veut pas voir sa maison et sa fortune dans les mains des sœurs une seule seconde de plus. Elles s’installent alors dans un modeste cottage en pleine campagne anglaise. Elinor, la plus grande, est la raison : elle sait mettre ses émotions de côté et jauger les situations avec beaucoup de tact et de neutralité. Elle fait la part des choses et ne désire que le bonheur de sa famille. Sa petite sœur Marianne ressemble plus à sa mère : elle vit ses sentiments profondément, sincèrement et sans faux-semblants, quitte à paraître un peu brusque ou audacieuse en société. Elle joue du piano et chante, se passionne pour mille choses, aime immodérément. Les deux sœurs pensent toutes deux à se marier prochainement. Mais avec qui ? L’emménagement dans le cottage leur permettra de faire la connaissance d’une nouvelle société propice aux rencontres. Le colonel Brandon, loyal mais peu chaleureux, le séduisant Willoughby, les deux pétillantes sœurs Steele, la bavarde Mrs Jennings, etc. Mais c’est aussi l’occasion, étrangement, de recroiser des membres de la famille : Edward, le frère de la nouvelle Mrs Dashwood, et même le grand-frère et la mère de celui-ci.

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Les sentiments se déploient, se devinent, se cachent, se rompent et on se prend d’une affection débordante pour les deux sœurs qui, bien qu’elle soient foncièrement différentes, sont toutes deux profondément gentilles et généreuses. Les romances Harlequins n’ont qu’à bien se tenir ! Jane Austen arrive à nous passionner par de simples histoires de cœur, rendez-vous compte ! On vibre tellement fort aux côtés d’Elinor et de Marianne. On suit avec ferveur le moindre échange, le moindre geste.

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Il faut dire que c’est un roman d’époque : l’étiquette est de rigueur, le mariage sert à entretenir son image et à s’enrichir. L’amour peut y avoir sa place, mais la froide raison également. Des projets imminents ne se réalisent plus car la réputation ou l’épargne ne suit pas. C’est le couperet de la société, une épée de Damoclès au-dessus de chaque couple. Jane Austen a su retranscrire les manières de faire, de vivre d’une société passionnante, c’est aussi cela qui explique son succès. L’écriture est soignée mais à la portée de n’importe quel lecteur. Elle change de ce qu’on peut lire aujourd’hui bien sûr, mais une petite dizaine de pages et on s’y fait très très vite, d’autant plus que les traductions françaises sont très bien. On peut reprocher à l’auteur quelques raccourcis narratifs, mais cela nous permet d’avancer plus vite dans l’action, vers ce que l’on veut absolument savoir donc on lui pardonne aisément.

Lire Jane Austen, c’est vraiment plonger dans un autre monde et vivre aux côtés de personnalités incroyables. Raison et Sentiments n’est peut-être pas à mes yeux ma meilleure lecture de l’auteure mais il reste indéniablement un chef-d’œuvre que je vous invite à découvrir !

Et pour aller plus loin, je vous conseille l’article de Virginy sur Persuasion de Jane Austen.

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Jane Austen, Raison et Sentiments, traduction par Jean Privat, aux éditions 10/18, 6€60.

Notre-Dame de Paris, de Victor Hugo (lecture commune de janvier 2017)

515grkugwzl-_sx298_bo1204203200_Le mois de janvier est terminé et avec lui la première lecture commune de l’année. Ou presque ! Je commence fort l’année en effet avec un abandon de lecture. Et quel abandon ! Puisque c’est un roman phare de mon auteur chouchou que j’ai laissé sur le bord de la route : Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, un roman historique qu’on ne présente plus (et qui est quand même moins meugnon que le dessin animé de Disney).

Qu’est-ce que j’aime cet auteur ! J’apprécie autant l’écrivain (surtout le poète) que l’homme. Il a eu une vie tout à fait passionnante et a écrit des kilomètres. J’ai quand même lu pas mal de ses œuvres et je savais dans quoi je m’aventurais. Je me suis enquillé tous Les Misérables et pas en version abrégée, je connaissais donc le bonhomme et sa propension à digresser. Je croyais que j’aurais les épaules pour affronter la lecture commune du mois. Que nenni !

Il faut dire que j’étais sacrément occupée en janvier, et tracassée également. Les excuses pour ne pas lire étaient trop faciles à trouver. Je sortais de la lecture d’un gros pavé passionnant (dont je vous parlerai dans quelques jours) et je crois que j’étais à bout de souffle. Ré-enchainer sur un autre gros livre était une mauvaise idée.

Pour tout vous dire, je crains vraiment la panne de lecture. Donc au lieu de m’échiner à avancer dans ce roman, je préfère en abandonner la lecture. Je la reprendrais peut-être un jour ou – mieux – je lirai la version abrégée de Notre-Dame de Paris. Ma prochaine lecture de Hugo sera plus courte, sûrement des poèmes. Et ma prochaine lecture tout court sera contemporaine, rapide, agréable, histoire de me redonner envie et de ne pas retomber dans une panne de lecture de plusieurs mois comme j’ai pu connaître en 2016.

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Cela me peine d’autant plus d’à peine frôler les cent pages et pas plus que je n’ai rien contre cette histoire. C’est vrai que je connais déjà la fin et qu’historiquement ce n’est pas ma période préférée (Paris au Moyen Âge), mais les personnages me plaisaient, je commençais à bien me refaire au rythme de narration hugolien et je reprenais mes petites habitudes de sauter les digressions sans intérêt pour le récit. Hugo a énormément de talent pour retranscrire ce Paris que ni lui ni nous n’avons connu. Les personnages principaux sont présentés par le biais de Gringoire, un auteur sans le sou, et cette façon de les rencontrer est à la fois originale et efficace. J’aime Esmeralda, j’aime Phoebus, j’aime le narrateur. Les feux étaient dans le vert, mais je crois que j’étais découragé d’avance face à la longueur – langueur ? – de l’histoire. Il faut dire que Hugo aime prendre son temps et bien faire le boulot, c’est un perfectionniste.

Alors au lieu de me bloquer, j’arrête là les frais. Je suis déçue : mes abandons de lecture sont rarissimes et il faut que ça tombe sur la première lecture commune de l’année ! Mais qu’importe, je vais arrêter de culpabiliser pour me remettre tout de suite dans le bain. Après tout, la lecture de février est déjà lancée !

De son côté, Virginy du blog Des livres, des fils et un peu de farine voit plutôt ce roman comme un incontournable avec en fond un thème ici assez sombre : l’amour et l’impossibilité de le vivre. N’hésitez pas à aller voir son avis !

Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, aux éditions Pocket, 4€70.

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Une soirée littéraire, d’Ivan Gontcharov

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Cela faisait une éternité que je n’avais pas lu un roman russe. C’est une littérature que j’apprécie, mais à petite dose, sinon je fais vite une overdose justement ! Il faut dire que j’ai à chaque fois l’impression d’atterrir sur une autre planète, d’être catapultée dans une société à laquelle je ne comprends pas tout et, surtout, dont je ne fais pas partie. Et avec Une soirée littéraire d’Ivan Gontcharov, ça n’a pas raté.

Des invités sont réunis chez Ouranov : gens du monde du livre, connaissances, prétendantes, militaires. Une petite vingtaine, pour écouter une lecture. Pour la plupart, c’est une première. L’auteur n’est pas connu. Il s’agit à du premier roman sur lequel il travaille – histoires d’amour et de jalousies dans les hautes castes, à la russe. Lecture longue, qui en passionne certains, qui en ennuie d’autres. Petits discussions, coup d’œil, attitudes, pensées. On revient sur chaque personnage, on le présente. Car une fois la lecture passée, leur hôte les convie à un repas : le moment idéal pour reparler du roman lu, mais pas seulement. Littérature, journalisme, rang social, etc. De nombreux autres sujets de conversations vont émailler la nuit. C’est aussi l’occasion pour beaucoup de se rencontrer, de faire connaissance autour de la table. Des personnalités s’affirment, se dessinent.

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Un petit récit qu’on ne trouverait pas chez nos auteurs français. J’ai l’impression que seuls les Russes savent faire ce genre de récit : ambiance désuète d’une aristocratie du siècle passé, littérature classique qui s’oppose aux points de vue moderne, et galerie de personnages. Des personnages qu’on rencontre par touches, et que je n’arrêtais pas de confondre. On n’est pas assez proche d’eux, les dialogues constants nous embrouillent : je me suis perdue à plusieurs reprises, ce qui ne m’a pas aidé à dessiner la personnalité de chacun ! Toutefois, je me suis laissé bercée sans trop chercher à avoir le fin mot de l’histoire, et les pages défilent sans trop de difficulté. Mais je n’irai pas jusqu’à dire que cette lecture fut excellente. C’est un peu trop impersonnel, et surtout assez vain : je n’ai pas vraiment trouvé qu’il y avait là une intrigue, un but, un fil conducteur solide. On suit une nuit à la russe, en passant. Et je n’attendais rien de plus de ce petit livre ceci dit et il m’a diverti le temps d’une journée.

A vous de voir si vous voulez tenter l’aventure !

Ivan Gontcharov, Une soirée littéraire, traduit par Bernard Kreise, aux éditions de L’Herne, 16€.

Orgueil et Préjugés, de Jane Austen

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Les lectures communes 2016 continuent ! Et ce mois-ci, j’ai lu avec L’Aléthiomètre un fameux classique anglais : Orgueil et Préjugés de Jane Austen. Je l’avais lu au lycée, et je me faisais une joie de retrouver Darcy et Lizzie. Et ce n’est une surprise pour personne : ce roman est tellement génial que je n’ai pu qu’aimer ma lecture.

Si vous ne savez pas de quoi cela parle, suivez le guide. Elizabeth Bennet est la deuxième fille d’une famille de cinq enfants. Sa mère n’a qu’un désir, voir toutes ses filles mariées. Alors quand un gentleman de Londres s’installe dans la demeure voisine, c’est l’effervescence. M. Bingley fait de l’effet à tout le monde : il est agréable, bel homme, chaleureux. On ne dit par contre pas du tout la même chose de son ami Darcy : trop hautain, trop silencieux, vraiment antipathique. Très vite, Elizabeth se détourne des deux hommes : le premier est plutôt intéressé par sa grande sœur, et le second n’est vraiment pas un choix agréable selon elle. Elle s’amourache alors d’un officier de la ville voisine : en effet, une garnison y est stationnée. À l’occasion d’un bal, elle fait donc la connaissance du jeune Wickham qui lui donne la meilleure des impressions. Mais dans un monde de convention et de ragots, il ne faut pas toujours se fier à ses premières impressions, surtout quand l’attirance et l’amour entrent en jeu.

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Premières impressions, c’était d’ailleurs le premier titre choisi par l’auteure pour son roman. Mais on ne peut pas dire qu’Orgueil et Préjugés soit faux : Darcy a trop d’orgueil, Elizabeth trop de préjugés. Et cela, on s’en rend compte de plus en plus au fur et à mesure de notre lecture. J’ai adoré découvrir les personnages au fil des pages : les secrets ne sont plus secrets, les manigances sont mises au jour et les personnalités se dévoilent. Il est vrai que l’histoire, sans être banale, n’est pas très étonnante. Mais je vous prierai de ne pas résumer ce livre à une romance, il est beaucoup mieux que ça. C’est une histoire intelligente, rusée. Bref, c’est un classique anglais.

orgueil-et-prejuges-83375Quand je pense que Jane Austen a écrit ce roman alors qu’elle n’avait qu’une vingtaine d’années, je suis stupéfaite. Son écriture est virtuose, elle se lit encore aujourd’hui avec facilité et surtout un plaisir jouissif. En effet, l’humour et l’ironie sont légions dans ces pages et lire les chassés-croisés de lettres ou les dialogues est tout simplement addictif. Concernant l’intrigue, elle avance à un bon rythme : on ne s’ennuie pas, de nouveaux éléments viennent régulièrement remettre l’action sur le tapis. Cela s’accompagne d’une évolution des personnages très intéressante et surtout très juste. En effet, l’auteure a beaucoup travaillé ses personnages, leur profondeur psychologique et leurs relations. C’est normal, me direz-vous, puisque ce roman repose sur eux. Mais tout de même ! Pondre une Elizabeth Bennet, il faut le faire. C’est une jeune femme intelligente, intéressante, forte. Elle se conforme aux mœurs de son temps mais garde tout de même une forme d’indépendance qu’on admire : son répondant, ses traits d’esprits… Ah, je l’adore !

pride-and-prejudice-2Ce roman est une œuvre à lire, et c’est une porte d’entrée vraiment idéale pour découvrir les classiques anglo-saxons. Il est captivant, éblouissant, poignant, drôle et la plume de Jane Austen est d’une justesse absolument brillante. Un gros coup de cœur pour cette histoire que je redécouvre et je vous invite grandement à vous plonger dans cette lecture.

Jane Austen, Orgueil et Préjugés, traduction de l’anglais par Pierre Goubert, aux éditions folio classique, 9€20.

L’attrape-coeurs, de J.D. Salinger

51fv05tvm3l-_L’attrape-coeurs, quel livre énigmatique. Personnellement, je ne sais rien de l’auteur, J. D. Salinger, je ne me suis jamais renseignée. Je sais juste que c’est un livre qui fut important pour plusieurs personnes : lu à l’adolescence, il résonne encore dans leur vie d’adulte. Sur la sobre mais belle édition Pocket, il n’y a même pas de quatrième de couverture. Ayant réussi à ne jamais me faire spoiler, je suis partie complètement à la découverte en achetant cet ouvrage, je ne savais pas du tout où je mettais mes pieds.

L’histoire est difficile à raconter, dans un sens il n’y en a pas vraiment, mais c’est un roman fabuleux. Le héros, le narrateur est un jeune garçon qui s’est encore fait viré de son école. Encore une fois, il sait qu’il va décevoir ses parents, il aura sûrement le droit à l’école militaire maintenant.

Dans trois jours, il devra quitter pour toujours ces murs. Dire au revoir à ses camarades, à ce garçon étrange avec qui il partageait sa chambre. Mais il décide de tout quitter maintenant, il lui reste trois jours de répit avant que la nouvelle se sache dans sa famille, il veut en profiter. Remercier ce professeur qui l’a aidé, retrouver quelques filles, aller en ville, boire un verre, acheter un CD pour sa petite sœur adorée. Bref, passer du bon temps, malgré son coup de blues et sa lassitude, sa démotivation et son rire gris.

L’histoire en elle-même ne paie pas de mine, surtout racontée en ces termes, mais elle représente une tranche de vie importante pour ce jeune homme, comme un point de bascule ténu. Il a une vision du monde et surtout des personnes très particulières, forgée par l’observation, la critique et un franc parler qui surprend à la lecture. En effet, le narrateur, c’est lui, et il ne fait pas d’effort de langage particulier pour s’adresser à nous. C’est un style assez oral ou peu travaillé, c’est selon comme on souhaite le voir, avec ses tics de parole, ses raccourcis linguistiques. Sur ce point-là, je trouve la traduction française assez désastreuse, mais si on en fait abstraction, on découvre vite que ce style est tout à fait naturel et représente parfaitement ce personnage si brumeux, si adolescent, qui entre avec difficulté dans la vie d’adulte responsable.

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J. D. Salinger

Un genre de roman d’apprentissage, même si le héros n’apprend que peu de choses, si ce n’est mieux se connaître. C’est un petit livre dont la lecture se fait assez facilement et rapidement si on s’y laisse plonger. Je suis contente d’avoir découvert ce livre dont on m’a tant parlé. Il donne à réfléchir et à sourire, il nous emmène dans une fugue à la recherche de réponse, pour fuir une certaine réalité.

J. D. Salinger, L’attrape-coeurs, Pocket (4230), traduction par Annie Saumont, 5€30.

Les Misérables, de Victor Hugo

Et voilà, une page se tourne dans ma vie de lectrice. J’ai lu Les Misérables de Victor Hugo. En entier. EN ENTIER les amis ! Dans mon édition Folio classique, cela représente deux tomes, 1800 pages cumulées, et c’est écrit tout petit… Fiou, quelle aventure, je peux dire que je ne m’en suis toujours pas relevée.

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Y a-t-il besoin de résumer l’histoire ? Parce que si la réponse est oui, ça risque d’être compliqué. Il y aurait tellement de choses à dire. Bon, je me lance. Le fil rouge de ce roman, c’est bien sûr Jean Valjean, un homme en rupture de ban qui vit sa vie caché, toujours menacé par Javert qui aimerait bien le mettre derrière les barreaux. Alors qu’il s’est recrée une vie (et il en aura plusieurs dans ce roman), il rencontre Fantine. Elle se meurt et le supplie d’aller chercher sa fille Cosette, qu’elle a placé dans l’horrible famille Thénardier. C’est ainsi que Jean Valjean va devenir le père adoptif de la petite. Puis l’enfant devient adolescente et commence alors un amour timide avec Marius. Mais une révolution naît dans les rues de Paris et Marius rejoint les barricades, où il rencontre entre autres le célèbre petit Gavroche. Et je vais m’arrêter là, histoire de ne pas tout vous dire non plus et vous laisser découvrir la fin. Sachez qu’il y a entre ces pages de multiples intrigues que je n’ai même pas effleurées et des dizaines de personnages qui valent le détour (Ah, Eponine…).

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Alors, Les Misérables, bien ou pas bien ? Ouh, qu’il est dur de répondre. Il est compliqué d’avoir un avis tranché sur la question concernant cette immense fresque que Victor Hugo a fini d’écrire alors qu’il était en exil à Guernesey. Globalement, j’ai été ravie de ma lecture.

Si je n’avais qu’un conseil à vous donner, c’est de lire petit à petit ce roman (il est divisé en parties, en livres, vous pouvez faire des pauses facilement), et je vous encourage presque à le découvrir avec une version abrégée. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il y a des chapitres de plusieurs dizaines de pages qui ne sont pas liés directement à l’action, à la narration. Ce sont des passages qui devaient sûrement avoir un autre retentissement à l’époque de Hugo (puisque c’est tout de même un pamphlet contre la misère cette œuvre-là). De même, aujourd’hui, on sait un peu près ce que sont des égouts et comment cela fonctionne, vous n’avez donc pas un besoin absolu de connaître sur le bout des doigts l’histoire des égouts de Paris et leur mode de fabrication (mais si vous le voulez, Hugo l’explique très bien). Je dois l’avouer, à partir du deuxième tome, j’ai sauté quelles pages de ce type qui ne faisaient pas avancer l’histoire.

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Mais j’ai une excellente raison pour cette entorse à mes règles de lecture habituelles (tout lire) : mon addiction aux personnages. Car la grande force des Misérables, c’est justement eux : ceux qui n’ont pas toujours de la chance, qui vivent très simplement voire dans la pauvreté, ceux qui se font avoir, ceux qui volent, ceux qui quémandent, ceux qui se révoltent, ceux qui cherchent l’espoir d’une vie meilleure, ceux qui aiment sincèrement et naïvement. Hugo a un talent incroyable pour croquer les personnages de tous ses romans mais ici, il y injecte une force, une vie qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. Ces êtres de papier ont une âme, ils ont des rêves et des regrets. Ils grandissent et voient leur vie changer, en même temps que nous au rythme des pages qui se tournent. C’est une grande fresque que peint ici Victor Hugo avec un talent, non, un génie, indéniable. Tous les personnages ont des liens entre eux, il y des fils qui les relient de tous les côtés. Et ce qui est formidable dans tout cela, c’est que ces liens servent dans l’intrigue et qu’on s’y retrouve toujours.

Personnellement, j’ai n’ai pas vraiment aimé Cosette et Marius, mais Jean Valjean ou même Javert vers la fin m’ont complètement bluffée et accrochée. Et c’est pour ça, c’est grâce à ça que j’ai réussi à finir ma lecture avec plaisir.

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Car oui, on ne va pas se leurrer, la lecture des Misérables est très conséquente. Elle est destinée aux lecteurs de pavés et/ou aguerris. C’est un classique d’un autre siècle, mais il n’est toutefois pas si éloigné de nous. Alors oui, l’écriture n’est pas celle d’aujourd’hui, et Hugo nous spoile souvent avec ses titres de chapitres, mais je vous conjure d’essayer, vraiment. Car le style est tout à fait fluide et lisible. Les mots coulent d’eux-mêmes et les pages se tournent avec une certaine facilité. La force des personnages vous donnera envie de continuer votre progression dans l’œuvre. Je ne vous cache pas que dans un roman aussi grand, il y aura des passages qui vous plairont moins que d’autres : j’ai adoré la première partie jusqu’à l’enfance de Cosette, je me suis ennuyée pendant les barricades. Mais vous trouverez, je n’en doute pas, des pépites, des pages qui vous feront vibrer, pleurer, frissonner (si, si!). Je me suis vraiment attachée à ces personnages et j’en parle encore avec des vibratos dans la voix tellement j’ai eu de la peine à les quitter.

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Ce roman ne vous laissera pas indifférent, et je vous encourage à essayer cette lecture. Elle est si longue qu’elle constitue une sorte d’engagement, c’est sûr. C’est une aventure, une expérience, une immersion littéraire absolument hors-normes. Mais je pense qu’on tient là le meilleur du Hugo romancier en terme de personnages. Et si jamais la lecture de ce mastodonte vous effraie mais que l’histoire attise votre curiosité, je vous invite à visionner la très très bonne adaptation réalisée par Tom Hopper en 2012 sous forme de comédie musicale avec Hugh Jackman, Anne Hathaway, Amanda Seyfried, Russell Crowe…

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Les Misérables m’ont permis également de refaire un challenge : en l’occurrence le challenge Un pavé par mois du blog Des livres, des livres ! avec la lecture du tome 2 (887 pages).

La Princesse de Montpensier, de Madame de La Fayette

513so4bdpul-_sx302_bo1204203200_Ce mois-ci, ont commencé les lectures communes 2016 lancées sur le blog en début de mois (voir le principe ici). Et comme cela a commencé un peu tard (mon entière faute bien sûr), j’ai proposé la lecture d’une nouvelle : La Princesse de Montpensier de Madame de La Fayette. Vous ne lisez pas ce genre de littérature mais ce titre vous dit quelque chose ? C’est normal puisque cette histoire a été également adaptée en film en 2010 par Bertrand Tavernier avec Mélanie Thierry dans le rôle principal.

Sur fond de guerres de religion, au temps des rois et des reines, une jeune femme est mariée au Prince de Montpensier. Ce dernier est souvent absent : il combat pour son clan et ses convictions. Mais cela permet aux amours de naître et de revivre, et surtout aux amours interdites. Il y a tout d’abord le comte de Chabannes qui est follement épris de la princesse et lui déclare sans cesse son amour. Mais il a l’âge d’être son père et c’est même lui qui se charge de la transformer en vraie dame du monde. La jeune femme fait tout alors pour l’ignorer et le contraindre contre sa volonté à un rôle d’ami très cher. Elle le torture, s’en rend-elle compte ? Ce n’est pas tout : le futur roi de France, le duc d’Anjou, est lui aussi amoureux de la belle. Mais la Princesse de Montpensier n’a d’yeux que pour un seul homme, et il ne s’agit pas de son mari : c’est son ancien amant, toujours amoureux d’elle également, le duc de Guise. Quant à son mari justement, une féroce de jalousie ne peut être que la seule réponse possible.

Qu’est-ce qu’il y a après un triangle amoureux ? Polygone à 5 côtés ? Une princesse belle comme le jour, et quatre hommes du monde. Une sacrée histoire, qui a traversé le temps.

11_93sr5Madame de La Fayette a une plume qui vous fait remonter le temps comme si vous étiez, comme si vous en faisiez partie. Retour presque immédiat à l’époque de la chevalerie. Les histoire d’amour décidément ont lieu partout, en tous temps et sur tous les continents. Et les hautes sphères de la société de l’époque, dans leur prison de conventions, de mariages arrangés et d’épouses fidèles, sont presque le nid idéal pour que des situations de la sorte naissent. Avec notre point de vue d’aujourd’hui, il y a tellement de choses à redire sur cette nouvelle : il faudrait nous réexpliquer par le menu le contexte, on se pâmerait devant la naïveté et l’irréalisme des comportements ou des scènes décrites ici, on se taperait la tête contre les murs face à cette princesse si gnangnan.

Oui, MAIS. Mais il faut prendre cette nouvelle pour ce qu’elle est : un écrit de femme (signé sous un autre nom à l’époque) publié, qui prend en compte les mœurs clairement admises de son temps et a fait rêvé des milliers de femmes et d’hommes face à ces amours impossibles. Il ne faut pas se moraliser des questions d’égalité homme-femme, car ça n’a tout simplement que peu de sens dans le contexte de cette nouvelle. Pour ceux et celles qui ne seraient pas sensibles à mes arguments, je vous demande à présent de voir cette nouvelle comme une histoire d’amours passionnés. Car peu de plumes serait capable de raconter les affres, les tortures et les bonheurs de l’amour aussi bien que Madame de La Fayette. Il est indéniable que cette auteure a un talent particulier pour décrire la violence des émotions et créer des personnages plein de vie.

Alors il est vrai que sur un plan pratique, cette nouvelle est assez dense, et au début il faut prendre le temps de bien replacer chaque personnage. Mais une fois ce petit effort fait (et ce n’est pas grand-chose, la nouvelle ne fait qu’une trentaine de pages), vous vous régalerez à chaque dialogue et vous vous prendrez d’affection pour un personnage. Personnellement, j’avais du mal à supporter la princesse mais je comprenais le mari et je compatissais au sort de Chabannes.

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Je trouve que cette nouvelle est un parfait avant-goût de cette littérature de l’amour chevaleresque : je l’ai trouvé très accessible, divertissante et presque « moderne » par certains côtés. Alors, c’est sûr, je ne m’enfilerai pas des romans de ce genre et de cette époque par paquets de douze, mais ce petit livre a agréablement changé de mes lectures habituelles.

Madame de La Fayette, La Princesse de Montpensier, aux éditions Pocket, 1€55