Les ateliers d’écriture du Prix du Jeune Écrivain

Aujourd’hui, on ne va pas parler de lecture – enfin pas tout à fait. Dans le domaine de la littérature et du livre en France, je trouve qu’il y a quelque chose de formidable qui participe pleinement à cette forme d’exception française qu’on aime bien mettre en avant : nous vivons les livres. Nous vivons les mots, nous vivons la littérature. Les librairies et les bibliothèques sont plus qu’actives, faisant des rencontres et des débats à tour de bras. Les petits salons du livre comme les gros festivals sont légions sur notre territoire. Et je regarde tout cela avec un œil extrêmement bienveillant : je suis heureuse quand j’observe les recueils, les bouquins, les fascicules s’épanouirent dans les mains de lecteurs curieux et voraces plutôt que prendre la poussière, oubliés de tous. Et dans ce domaine-là, on oublie trop souvent de parler des associations. Cercles de lecteurs, ateliers d’écriture, prix littéraires, soutien à la langue… des milliers de personnes à travers le monde font vivre les mots dans le domaine associatif.

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Je tenais donc à vous parler du Prix du Jeune Ecrivain (ou PJE pour les intimes). Depuis plus de trente ans, cette association basée au Sud de Toulouse défend la création littéraire en langue française. A travers son Prix, elle invite tous les jeunes francophones du monde entier à écrire des histoires, des nouvelles. Cela fait cinq ans maintenant que je gravite autour de l’association, et l’émulation autour de l’écriture et de la littérature y est assez extraordinaire. Mais plus que le Prix, qui est déjà une grande aventure, j’ai plus d’affection pour les autres activités de l’association.

Pour faire rapidement : le PJE organise trois rencontres/événements ainsi qu’un festival (théâtre/musique…) de deux semaines chaque année dans sa ville, Muret. L’association est comité de lecture pour le Prix des Cinq Continents de la Francophonie (organisé par l’OIF) et pour le prix Claude Nougaro (organisé pour la région Occitanie). Mais surtout, ce qui est si cher à mon cœur : le Prix du Jeune Ecrivain organise chaque année des ateliers d’écriture. Pendant plusieurs jours, vous pouvez travailler autour d’un thème en petit groupe avec un auteur. Et c’est une expérience magique. Bien évidemment, vous progressez, vous mettez le doigt sur vos forces et vos faiblesses d’écrivain. Mais surtout, vous vivez des instants uniques de partage, de rencontre. Des gens venus de tous les horizons, de toute la France et de l’étranger se donnent rendez-vous près de Toulouse le temps d’une petite semaine pour écrire. C’est une parenthèse qui fait du bien : on prend du recul, on se coupe du reste du monde, on est entre nous, sans jugement et avec beaucoup d’amitié et de bienveillance…. Juste pour écrire. Pour l’avoir vécu, croyez-moi, c’est quelque chose.

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L’atelier d’écriture d’Alain Absire.

Je ne suis pas là pour vous vendre un produit. Je ne vais pas m’étaler sur les conditions agréables, sur la réputation des auteurs qui mènent les ateliers, sur l’expérience de l’association dans le domaine. Sachez juste qu’il y en a pour tous les goûts : des auteurs strictes et motivants, d’autres plus doux. Romans, poèmes, nouvelles, vous croiserez toutes sortes de littératures. Il reste encore quelques places pour cette année, en juillet 2017, au tout début des vacances scolaires. Si jamais vous hésitez, si jamais cela vous intrigue… n’hésitez pas à me laisser un petit message ou à contacter l’association.

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Jean-Claude Bologne conseille Pénélope sur son texte.

Pour ma part, j’aurai le grand plaisir cette année encore d’être dans les parages pour aider les bénévoles et je compte bien vivre cette expérience à fond. Pour un prix très raisonnable, je ne crois pas avoir encore croisé de tels ateliers. Et vous ? Avez-vous déjà eu l’occasion de vivre telle expérience ? Je veux tout savoir !

Livre Paris et Prix du Jeune Ecrivain

La fin du mois de mars a été très chargée en terme d’événements livresques et de découvertes littéraires.

livre_paris_2017Alors que je finissais en urgence la lecture commune du mois de mars, je me suis envolée avec bonheur pour Livre Paris. Un salon que j’attendais avec grande impatience puisque j’avais prévu d’y revoir de nombreuses connaissances, beaucoup d’amis que je ne croise jamais. Et quel régal de tous vous revoir ! La cerise sur le gâteau : voir des personnes dont j’ignorais jusqu’à la présence à Paris. Une de mes plus grande joie a été de pouvoir retrouver l’association du Prix du Jeune Écrivain à Livre Paris. J’ai pu travailler pour eux il y a quelques temps et cela va bientôt faire quatre ans que je gravite autour de l’association. Le Prix qu’elle propose est international et francophone et s’adresse aux jeunes du monde entier. Chaque année, presque 1000 manuscrits arrivent dans leur local à Muret – au sud de Toulouse. Et chaque année, des lauréats sont désignés par un jury d’écrivains et invités au Salon du Livre de Paris – entre autres choses.

DSC_6694 (Copier)C’est donc avec bonheur que je me suis rendue le samedi sur le stand Île-de-France où avait lieu un débat autour des écrivains de demain en présence des lauréats Bienvenue Eric Damiba, Elise Leroy et Anna-Livia Marchionni,, ainsi que d’écrivains membres du jury : Mohamed Aïssaoui, Alain Absire (président du jury) et Carole Martinez (que décidément j’adore). Un espace intimiste, des interventions intéressantes, un très bel échange qui a été pour moi l’occasion de retrouver les bénévoles, les amis rencontrés au PJE et de voir un peu à quoi ressemblait le cru 2017.

Toute la journée, j’ai vadrouillé au gré des rencontres dans le salon. De 10h à 19h, j’ai arpenté les allées, me perdant moult fois à cause de la signalétique absolument pourrie (on est d’accord, hein?). A l’inverse de l’année dernière, je n’avais pas pour but d’arpenter tous les stands. Je suis allée directement voir les éditeurs qui m’intéressaient, je m’étais fait un planning des conférences qui me tentaient mais sans me mettre la pression. J’ai beaucoup appréciée la scène littéraire, comme chaque année et la scène professionnelle était passionnante. Je regrette de ne pas avoir su à l’avance qu’il y avait des ateliers, ceux-ci m’auraient bien tenté. Cette année encore, je trouve le prix de l’entrée un peu cher, l’organisation présente des couacs, mais il y a de légers mieux il me semble. J’aime tellement ce rendez-vous que je me pose sérieusement la question de prendre un pass Grand Lecteur pour l’an prochain – d’ailleurs, si certains l’ont essayé, vous en avez pensé quoi ?

Côté dédicace, une seule me tenait vraiment à cœur et ça commence à devenir un rituel : avec la pétillante Nounja aka @MusicaduMN, nous nous retrouvons pour aller faire dédicacer ensemble le dernier roman de Cindy Van Wilder, l’auteure des Outrepasseurs. S’il y a bien un écrivain pour qui j’accepte de faire la queue sans me plaindre, c’est bien Cindy. Je suis toujours ravie de la revoir, elle est très proche de ses lecteurs et toujours souriante. Merci Nounja pour Memorex, merci Cindy pour tes dédicaces ❤

A peine le temps de repartir avec mes livres signés – mes seuls achats de tout le salon, autant dire que j’ai été très sage –, je m’élance vers le stand Buchet Chastel. C’est le moment, ça y est : la proclamation du palmarès du Prix du Jeune Ecrivain et les dédicaces du recueil tout nouveau, tout beau. C’est un peu la pagaille, il faut dire que le stand fait plus librairie que lieu de réception, et les micros sont interdits, mais l’émotion est quand même au rendez-vous. Les lauréats, la famille du PJE, les curieux réunis autour d’Alain Absire qui énonce le palmarès. La concrétisation d’une année de travail pour ce 32ème prix. Et il faut dire que la cuvée de cette année a l’air sacrément sympathique et j’ai eu un vrai coup de cœur pour le premier prix, Anna-Livia. « C’est une vraie » dixit mon amie et ancienne collègue Laura, et je ne peux que confirmer ! Talent, modestie, sincérité, elle est décidément très touchante cette Anna-Livia.

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Ma journée touche à sa fin. Je ne quitte pas encore Paris mais le salon du livre, c’est fini pour moi. Promesse de revenir l’an prochain en espérant que l’organisation s’améliore encore.

DSC_8014CC (Copier)Toutefois le mois de mars n’est pas terminé et il reste un de mes événements préférés de l’année : la remise du Prix du Jeune Écrivain à Muret, tout près de chez moi, le mercredi 29 mars 2017. A cette occasion, un extrait de chaque texte est lu par un comédien de la Comédie-Française ; cette année, il s’agissait de Didier Sandre et Sylvia Bergé. Intermèdes musicaux, petits mots de la part des lauréats et des membres du jury. Une mise en scène simple et très chaleureuse, rythmée. J’ai savouré chaque lecture et découvrir les textes dans ce cadre-là a été très agréable malgré la fatigue accumulée de la journée. Une bonne ambiance, et toujours la joie de retrouver les gens du PJE. Je suis contente de faire partir de cette association qui me donne l’occasion de découvrir de nouvelles plumes et je ne peux que vous inviter à visiter leur site internet pour en savoir plus sur leurs actions. Ils organisent notamment de supers ateliers d’écritures tous les étés.

Le mois d’avril sera, je l’espère, plus calme et plus propice à la lecture et à l’écriture. Et vous, vous avez été au Salon du Livre cette année ?

La Revanche de Kevin, de Iegor Gran

revanche-siteEn ce moment, je suis prise dans une frénésie de lecture, avec un rythme de presque un roman par jour. Sauf le week-end, bizarrement. Bref, j’ai donc plein de chroniques dans ma hotte, alors autant commencer dès maintenant à vous parler de mes dernières lectures. Je reviens à peine du Salon du Livre, alors quoi de mieux que de partager avec vous un roman dont l’histoire commence dans ce même salon.

Je l’avais croisé sur la blogo, et ça faisait déjà quelques mois qu’il traînait dans ma whishlist : La Revanche de Kevin de Iegor Gran. Avec un titre pareil, vous pensez bien, ça m’a rendue curieuse. Kevin travaille pour la Radio (avec une majuscule). Il est commercial. Dans un milieu où tout le monde parle, se pavane, écrit, il sait bien que son prénom fait tâche. Il a en effet conscience qu’on ne dit plus de Kevin que c’est un prénom breton, mais plutôt que c’est un prénom de pochtron intellectuellement limité. Alors, il veut se venger, de tout ces gens qui se crispent ou ont des regards en coin dès qu’il se présente.

Il a manigancé la chose et la pratique depuis assez longtemps pour être devenu un expert. Il endosse une fausse identité, et piège un auteur. Le dernier exemple en date a eu lieu au Salon du Livre de Paris : il s’est fait passé pour un lecteur d’une grande maison d’édition et a réussi à faire tomber dans le panneau un écrivain. François-René Pradel pensait en effet avoir envoyé son dernier manuscrit à Alexandre Janus-Smith. Ce dernier lui avait promis l’édition de son livre. Mais quelle déconvenue quand il apprend finalement que celui-ci n’a jamais existé !

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Voilà, c’est ça, la revanche de Kevin. Un jeu pas si innocent que ça qui lui permet de se sentir un peu plus fort que les autres. Mais jouer avec les sentiments d’autrui, vous vous en doutez, ça n’attire pas que des bonnes choses, loin de là. Le mensonge gangrène son couple, le rend arrogant, pompeux, hypocrite. Jusqu’au jour où. Je ne vais pas vous en dire plus, à vous de découvrir la suite.

Cette lecture m’a vraiment surprise. Ce n’est pas un coup de cœur, mais disons une agréable découverte. J’ai été promenée d’un bout à l’autre, obligée de suivre Kevin. Un héros que je n’ai pas forcément aimé. Et non pas à cause de son prénom, mais plutôt à cause de ce que ce prénom a fait de lui : il est imbu de lui-même, n’a aucune empathie, et ne pense qu’à lui. Alors oui, il est cultivé. Mais il s’intéresse à la culture non pas pour elle-même, mais juste dans un but d’ascension sociale, ou plutôt de revanche sociale. Mais même si on ne s’attache pas à lui, parce qu’on ne l’aime pas, on veut savoir ce qu’il va advenir de lui. En effet, les événements s’enchaînent, empirent.

On pourrait penser au premier abord que ce roman montre les travers du monde de l’édition et c’est vrai qu’il y en a beaucoup. Mais plus que cela, il montre du doigt ceux qui dénigrent ce monde sans savoir, sans penser une seule fois que là aussi il s’agit d’êtres humains avec des ambitions, des émotions. Il n’y a pas une tension folle dans ce livre, toutefois ce roman nous tient en haleine, au détour d’une phrase, notre cœur rate un battement. Car Iegor Gran a ce génie dans l’écriture de rendre tout cela naturel. On ne se croit pas dans une fiction, mais dans la vraie vie. Devant un fait divers tout juste romancé. Les personnages sont très réalistes, même s’ils nous font parfois grincer des dents. Les pages se tournent vite, grâce à une intrigue bien ficelée et à une narration qui fait avancer l’action à un rythme régulier. Quant à la fin… On sent à ce moment-là que ce livre arrive à être bouleversant. Il y a dans ces phrases un peu d’humour grinçant, mais j’avoue mettre sentie assez souvent mal à l’aise, sûrement l’effet recherché par l’auteur d’ailleurs.

La Revanche de Kevin est un roman que je vous invite à lire, en gardant votre curiosité et votre bienveillance. Si vous ne vous braquez pas contre certains des personnages, je suis sûre que vous apprécierez cette lecture.

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Iegor Gran, La Revanche de Kevin, édition P.O.L., 15€.

TAG La plume en herbe

Je ne fais pas que lire, j’écris. (Et pas seulement des articles de blogs et des tweets, cela s’entend.)

J’écris même depuis sacrément longtemps. Et aujourd’hui, j’ai décidé de vous en parler, histoire qu’on se connaisse mieux vous et moi. Je vais faire ça sous forme de questions/réponses. On pourrait presque appeler cela un TAG, oui, allez, le TAG de la plume en herbe. (On dit bien « écrivain en herbe », non?). En plus, il y a dix questions tout pile. J’aime bien quand les choses sont carrées.

La plume en herbe

Surtout, n’hésitez pas à reprendre ce TAG partiellement ou totalement sur vos blogs ou vos pages perso, ou même en commentaire. Je suis vraiment curieuse de voir s’il y a des auteurs derrière les lecteurs que je côtoie sur la blogosphère.

1. Tu écris depuis quand ? Comment s’est venu ? Oulah, je dirais que j’écris depuis que je sais écrire. Ma maman m’a très vite donné le goût des histoires en me lisant chaque soir patiemment des contes. J’ai tout de suite eu le virus de la lecture, mais cela ne suffisait pas. J’avais une imagination débordante, c’est donc tout naturellement que l’écriture de fiction est entrée dans ma vie.

2. Tu écris quoi ? De très loin, je préfère écrire des romans, même si j’arrive à en écrire et à les finir que depuis trois ans environ. Je ponds aussi quelques nouvelles parfois, mais j’y prends moins de plaisir. C’est pour moi plus un exercice pour m’entraîner et ne pas perdre la main entre deux romans.

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3. Ton parcours de plume en herbe ? Petite, j’écrivais des micro-histoires, des petites poésies, des chansons. Puis c’est passé au journal intime dès le collège (on aime bien se regarder le nombril à cet âge-là). Au lycée, j’ai essayé des textes très courts, personnels et poétiques. J’ai très très peu écrit à mon entrée en fac, mais mon admission en master écriture a tout changé. Et je suis tellement heureuse d’avoir pris cette voie ! L’écriture est vraiment un art dans lequel je m’épanouis pleinement. Il y a des défis à relever et des possibilités infinies. Puis, il y a eu la rencontre qui a tout changé : le NaNoWriMo dont je parle et reparle souvent sur le blog. Grâce à cet événement, j’ai pu finir mon premier roman, et… ouah quelle sensation ! Depuis j’en redemande. Et pas plus tard qu’hier, j’ai mis le point final au premier jet de mon troisième roman ! *clap clap clap*

4. Tes rituels d’écriture (lieux, matériels, etc.) ? J’écris sur mon ordinateur après avoir noté sur un carnet mes idées d’intrigues, de noms, etc. Hors NaNoWriMo (où là, par nécessité, j’écris n’importe où et sur n’importe quoi), je préfère écrire le matin à la bibliothèque ou dans un café. J’arrive assez facilement à me concentrer dans ce genre d’ambiance, et j’évite de mettre le WiFi pour ne pas être trop tentée… J’ai toujours du thé avec moi, et un truc à grignoter. J’écris sans musique, mais j’en mets parfois pour couvrir les bruits de ceux qui bavardent tranquillement en dérangeant tout le monde à la bibliothèque.

5. Ta méthode d’écriture ? Plutôt jardinier ou architecte ? Je note des idées (un thème, un personnage, parfois je pars juste avec un titre), et hop je me lance. En ça, je suis jardinier, j’attends que ça vienne. Cela donne des scénarios invraisemblables et géniaux à mon goût que je n’aurais jamais imaginer en préparant tout à l’avance. Avec mon dernier roman, j’avais essayé d’être architecte : j’avais préparé un plan sommaire (plutôt un chapitrage), des fiches de personnages, des docs historiques et biographiques… Mais au bout de 10 chapitres, c’est parti à toute berzingue dans une direction tout à fait inattendue, et je suis plutôt du genre à suivre le mouvement pour voir où ça me mène. (Et j’en suis assez contente.) Après le premier jet, je laisse reposer le roman loooongtemps (parfois un an voire plus!), puis je le reprends pour une réécriture complète : c’est-à-dire que j’imprime la première version et je retape tout différemment, en bien mieux, et en faisant des coupes drastiques. C’est souvent à s’arracher les cheveux de me relire : les incohérences dans la narration qu’il faut corriger, les fautes de français, les oublis… Puis je laisse reposer encore un peu et je le reprends une deuxième fois, mais cette fois-ci pour une ou plusieurs relectures. Après vient le moment des bêta-lecteurs, des derniers remaniements et corrections. Et voilà un roman tout beau, tout propre, écrit avec amûûûr. Pour l’instant, je n’ai jamais rien voulu présenter à un éditeur, je n’ai pas du tout l’étoffe d’un « vrai » écrivain. Mais peut-être qu’avec le petit dernier, je franchirai ce pas, parce que j’en suis sacrément fière quand même !

6. Qu’est-ce que tu aimes et détestes le plus dans l’écriture ? J’adore être surprise par mes personnages. J’adore la première réécriture. Je m’éclate avec la ponctuation aussi et j’apprends à apprécier de plus en plus le travail sur les dialogues. Je déteste devoir faire des descriptions et au premier jet, je les zappe souvent. Je déteste devoir écrire alors que je suis fatiguée. En fait, il faut que je sois bien physiquement pour écrire.

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7. Comment tu combats le syndrome de la page blanche ? Je trouve des idées de romans un peu par hasard, dans le métro, ou sous la douche, je les note toutes. Et je sais qu’il m’est impossible d’écrire quelque chose si je n’ai pas une de ces idées sous le coude, donc je ne tente même pas sinon c’est page blanche assurée. Sinon, pour le reste du temps, je m’astreins depuis des mois à un petit rythme pépère d’écriture deux ou trois matins par semaine minimum. C’est peu en réalité, mais au moins avec ça j’avance sûrement dans mes projets. Et bizarrement dans ces moments, je suis dans le train, l’écriture avance d’elle-même sans que j’ai trop à me forcer. Pour ce qui est de la réécriture qui peut me peser parfois, je me fixe des objectifs avec des pauses régulières ou une carotte à l’arrivée. Et si vraiment, c’est une période sans, je laisse tomber plusieurs semaines, je lis, je remplis ce blog (car cela reste TOUJOURS un plaisir), je me vide la tête, et quand j’y retourne, ça va mieux !

8. L’écriture, c’est quoi pour toi ? C’est un vrai moyen d’explorer d’autres horizons et de découvrir de nouvelles facettes de moi-même. C’est presque un jeu ! Ce n’est pas une échappatoire, ni un refuge, mais plutôt une autre dimension avec des êtres en papier qui vivent leur vie et que je retranscris. C’est un loisir extrêmement gratifiant à titre personnel auquel je souhaiterais accorder plus de temps.

9. Tu écris quoi en ce moment ? Je viens de finir un roman dont le titre provisoire est Sur les falaises de Guernesey. L’idée a germé lors d’un atelier d’écriture en juillet 2015 et elle a mûri pour se réaliser avec le NaNoWriMo 2015. Ce gros bébé est immense, et l’écriture du premier jet m’a pris 8 mois de travail intense (entre la préparation et la rédaction). Je voulais à la base raconter comment Victor Hugo était revenu à la rédaction des Misérables alors qu’il était exilé sur l’île de Guernesey dans la magnifique Hauteville House. Toute sa famille m’intéressait : je voulais parler de cet univers-là. Mais un chapitre sur les séances de tables tournantes (auxquelles il s’adonnait à Jersey) a tout changé et le livre a pris un autre tournant (oh, oh, ce jeu de mot !). Pour faire claire, imaginer qu’American Horror Story s’invite en plein milieu de sa baraque. Phénomènes étranges, inquiétants, vols, folie, agressions, bref ! Je me suis beaucoup éloignée du sujet, mais j’en suis tellement heureuse ! J’ai quitté un biopic plan-plan, pour lequel je n’avais clairement pas l’envergure, pour une réécriture complètement fantastique et un peu sombre d’un épisode de la vie de Victor Hugo. Je me suis carrément arrangée avec la réalité, mais qu’importe ! On a le droit de tout faire en écriture de création…7

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10. Tes ambitions, tes envies, tes projets en écriture ? Mon prochain projet, c’est de commencer la réécriture d’un autre roman qui attend depuis presque un an, et de commencer la relecture du tout premier que j’ai écrit (avec un point final et tout et tout). J’ai quelques petites idées pour une ou deux nouvelles que je pense écrire avant le milieu de l’année, mais rien de bien pressant. Je n’ai pas d’ambition particulière, sauf peut-être pour ma toute dernière création, mais on en est loin : la réécriture de Sur les falaises de Guernesey va juste être colossale et va me prendre des mois ! Je ferai tout pour garder un rythme d’écriture similaire ou supérieure : l’écriture est devenue pour moi presque un besoin et je ne peux pas m’en passer très longtemps.

J’espère que cet article, plus personnel, vous aura plu. C’est à vous de jouer à présent. Vous êtes tous invités à répondre à ce TAG : n’hésitez pas à vous servir de l’image plus haut, et si vous caler le lien vers cet article quelque part, ça me fera très plaisir ! Je vous mets ci-dessous la liste des questions, pour que vous ne vous embêtiez qu’avec un seul copier-coller. J’ai hâte de lire vos réponses !

  1. Tu écris depuis quand ? Comment s’est venu ?
  2. Tu écris quoi ?
  3. Ton parcours de plume en herbe ?
  4. Tes rituels d’écriture (lieux, matériels, etc.) ?
  5. Ta méthode d’écriture ? Plutôt jardinier ou architecte ?
  6. Qu’est-ce que tu aimes et déteste le plus dans l’écriture ?
  7. Comment tu combats le syndrome de la page blanche ?
  8. L’écriture, c’est quoi pour toi ?
  9. Tu écris quoi en ce moment ?
  10. Tes ambitions, tes envies, tes projets en écriture ?

La fois où je suis devenu écrivain, de Vincent Cuvellier

Lire un livre où l’auteur se livre (oh, oh ! :p) sur la façon dont il est devenu écrivain alors que je suis en plein NaNoWriMo, ça a un côté rassurant. On se dit que les façons de parvenir à notre but (écrire un roman) sont très diverses, et l’important c’est que chacun trouve la sienne. La fois où je suis devenu écrivain, c’est l’histoire de Vincent Cuvellier qui revient vingt-cinq ans plus tard sur ses débuts dans le milieu littéraire.

À l’époque, Vincent est ado, il s’en sort mal au collège à tel point qu’il l’arrête dès ses seize ans. Il découvre alors les petits boulots, les stages, le chômage. Il essaie de s’en sortir comme il peut, comme on peut à seize ans, alors qu’on a autre chose en tête que son épargne retraite. Non, à seize ans, on pense aux filles, à l’image qu’on renvoie et on a des rêves aussi. Le rêve de Vincent, c’est de devenir écrivain, il n’a aucun doute là-dessus, c’est ce qu’il veut faire, c’est ce qu’il veut devenir. Déjà quand il était à l’école, il n’avait qu’une hâte, c’était de rentrer chez lui pour coucher des histoires sur le papier. C’était un moment de libération et de plaisir où enfin là il était à l’origine de quelque chose. Par hasard, Vincent participe à un prix littéraire qui récompense la nouvelle d’un jeune. Et il gagne. La première place. C’est alors une révélation. Le truc, c’est que sa nouvelle est un peu crue. Il utilise des gros mots, des phrasés courts. Et ça ne plaît pas à tout le monde, mais lui refuse une censure de politesse qu’on souhaiterait lui imposer. C’est ainsi que Vincent est publié à part des autres lauréats du prix, et pas dans le recueil commun. Il s’en fout, il vient d’être publié, et tout seul en plus. Il le sait, c’est le début d’une nouvelle vie. Sauf que la vraie vie n’est parfois pas si simple. On se trouve toujours des excuses pour ne pas écrire et pour ne pas affronter l’angoisse de la page blanche.

Ce livre très court s’adresse à un public jeune. D’ailleurs Vincent Cuvellier a une plume idéale pour s’adresser à ce genre de public : drôle, incisive et directe. On peut lui reprocher peut-être ce style qui semble peu mature, peu travaillé. Mais c’est un parti pris : celui de l’oralité, il n’y a pas de barrière de syntaxe et de propreté des mots entre lui et nous. On devient proche très vite de ce narrateur qui nous invite dans sa vie, dans son adolescence et ces quelques pages se lisent à toute vitesse. Toutefois, je pense qu’on peut trouver plus inspirant, mieux écrit comme livre sur la naissance d’un écrivain et même des ouvrages s’adressant à des adolescents. En lisant ces pages, j’ai encore eu l’impression de faire face à cet ado qui voulait vous mettre dans son panier et faire bonne figure pour vous impressionner. Or, c’est l’adulte qui parle. Il y a peu de points de vue vraiment rétrospectifs, vraiment intéressants en profondeur et c’est bien dommage. En soignant un peu plus son style, en allant plus loin dans ce livre – bref en prenant le temps de s’appliquer – je pense qu’il aurait été possible de nous fournir un témoignage beaucoup plus intéressant et moins tourné vers soi au point d’en oublier un peu le lecteur.

Mais toutefois, ce livre se lit vite et peut plaire pour une lecture rapide qui change un peu.

Vincent Cuvellier, La fois où je suis devenu écrivain, éditions du Rouergue, 8€50.

Capitaine Françoise, de Stéphane Rubin

Ah, l’auto-édition, ce pendant obscur du monde littéraire. Feigner de l’ignorer ou en être un défenseur actif : à chacun de choisir son camp. Pour ma part, je dois avouer que je n’ai pas la meilleure des opinions sur ce secteur, mais je reconnais qu’il y a parfois quelques surprises. Et je ne refuse jamais quand un auteur vient me voir tout gentiment pour me faire découvrir son roman. Et ça a été le cas avec Stéphane Rubin, qui m’a envoyée – avec un très jolie dédicace – Capitaine Françoise. L’histoire se déroule dans la tête de Françoise, une libraire bretonne, qui nous fait partager une de ses journées entre les rangées de livres et les clients. Le soir-même, il y a une rencontre sur les résistances (les mineurs lorrains, une des premières féministes, etc.) et c’est elle qui en a la responsabilité. Tout organiser, des petits fours à l’accueil de l’éditeur, de la vitrine aux livraisons, voilà son travail.

 

Chaque rencontre, chaque détail ou petite péripétie, donne lieu à des remarques, souvent avec verve et humour. Disons que la Françoise, elle est bourrue, et elle remâche des expressions bretonnes sans s’en rendre compte. Elle a un avis sur tout, a toujours des petites histoires, son monologue est plein de rebondissements. Autant dire que c’est exclusivement oral, même si c’est la plupart du temps des paroles mentales. Il faut s’habituer à cette vivacité et à cette expression que l’on n’a pas l’habitude de voir en littérature, tout de moins que l’on n’a pas l’habitude de voir de façon exclusive dans un roman.

Capitaine Françoise, c’est une fresque de personnages, avec une petite touche de géographie et de culture locale. Malheureusement, – et c’est là ma plus grande déception sur le contenu – ces personnages, qui constituent l’essence du livre, sont de vrais stéréotypes et manquent cruellement de profondeur. Entre les mamies copines, la jeune femme superficielle fan de chick-lit, l’étudiant doux et beau gosse de philo, les politiciens véreux et opportunistes, l’attachée de presse vampire, on a fait le tour des topoï je pense. Et alors qu’on est dans la tête de Françoise, je l’ai personnellement trouver assez fade ; tout reste en surface. Puis franchement, elle m’est assez antipathique, à avoir des idées sur tout et tout le monde : si elle existait dans la vraie vie, je ne l’aimerais pas. J’espère que pour d’autres lecteurs, ce n’est pas le même ressenti qui prime, car ça gâche la lecture, mais que voulez-vous, je n’ai pas choisi d’éprouver cela.

Cependant, c’est assez bien écrit, piquant et divertissant. On passe un bon moment et on découvre un petit bout du patrimoine breton (notamment la langue locale) et la verve du personnage principal fait sourire de nombreuses fois. Le coup de maître de l’auteur est de nous tenir en haleine alors que l’histoire ne se déroule que sur une journée (mais pourtant sur 236 pages écrites en petits caractères!), chapeau. Et il y a même des rebondissements et une fin surprenante !

Bien sûr, j’ai grincé les dents très très fort sur la correction ortho-typographique (auteurs en auto-édition, par pitié, PAR PITIÉ, arrêtez d’oublier le typographique de correction ortho-typographique) : les majuscules non-accentuées, les apostrophes mécaniques presque partout, les guillemets à l’anglaise, la présentation des dialogues n’importe comment. Futurs auteurs, ne négligez pas tout ça, car sinon, ça peut complètement vous décrédibilisez. Cela n’enlève rien au contenu, mai votre image (et donc votre texte) en prend un coup !

Capitaine Françoise, un petit livre distrayant et drôle, pour passer un bon moment sans se faire de soucis. À essayer !

Stéphanr Rubin, Capitaine Françoise, collection Mon libraire, ce héros, 15€. Pour vous le procurer, vous pouvez contacter l’auteur à l’adresse mail suivante : petitmot@petitsriens.com

Ecriture, mémoires d’un métier, de Stephen King

Depuis le temps qu’on me serinait « Quoi ? Mais tu n’as encore jamais lu un Stephen King, mais c’est the master of horror, ma chérie ! »… Ben oui, certes, mais ce n’est pas tout à fait mon genre de romans ; en plus, ce n’est proposé qu’un grand format, couverture rigide à la médiathèque, pas vraiment pratique pour l’emmener partout avec soi. Mais bon, c’est vrai qu’il m’intriguait ce lascar, alors j’ai quand même voulu voir à quoi ressembler sa plume, j’ai donc choisi le livre qui pouvait le plus potentiellement me plaire : Écriture, mémoires d’un métier.

Il faut dire qu’il a eu une drôle de destinée ce bouquin. Il était à peine commencé que l’auteur se fait renverser pas un van au cours d’une promenade. Résultat : jambe en miette, hanche pas au top, douleur, rééducation, tout le tintouin. De quoi faire réfléchir. D’ailleurs, King nous parle de cet accident en dernier partie (et il n’oublie pas ses talents de conteurs au passage).

Que peut-on lire dans ces pages ? Tout d’abord, il commence par nous énumérer quelques éléments de sa vie, surtout pendant l’enfance et l’adolescence, qui ont pu influencé sa nature d’écrivain. Cela aurait pu être intéressant mais je vous avoue que j’ai eu souvent vraiment du mal à dénicher le lien entre ses baby-sitters et ses romans effrayants, d’autant plus que tout le livre est très « américo-centré ». On ne peut pas vraiment lui reprocher, mais quand il nous évoque les revues dans lesquelles il publiait ses premières nouvelles, non seulement c’est une autre époque (de l’eau a coulé sous les ponts depuis) mais surtout ça n’évoque pas grand chose depuis notre petite France. Par exemple, plus loin, il évoque la question des agents littéraires qui sont légion aux Etats-Unis, le poblème c’est que c’est encore une méthode plutôt marginale en France, un travail encore peu répandu même s’il prend de plus en plus d’ampleur. Chez lui, un jeune auteur a tout intérêt à demander l’aide d’un agent pour se faire connaître, chez nous cet agent il faudrait trouver de quoi le payer avant toute chose… Ce sont les personnes déjà publiées et qui n’ont pas toutes les peines du monde à trouver un éditeur qui en profite avant tout.

Heureusement, c’est bien écrit, c’est facile à lire, c’est complice, c’est parfois drôle, mais surtout c’est sincère. Et cette impression ne m’a jamais quitté : King peut se vanter d’avoir créer une réelle relation avec ses lecteurs et de tout le bouquin, il ne nous lâche pas. Il l’a écrit pour nous ce machin, il nous l’adresse à nous qui nous intéressons de près ou de loin au monde de l’écrit de fiction. Alors pourquoi il mentirait, pourquoi est-ce qu’il travestirait les choses pour les rendre plus jolies, pourquoi prendrait-il un ton plus pompeux sous couvert que l’on parle de littérature ? Jamais il ne tombera dans le fossé de la fausse intelligence hautaine. Il reste à notre niveau, même si paradoxalement on s’en sent rabaissé quelques moments.

Dans les deux plus grandes parties de son ouvrage, Stephen King évoque avec nous quelques points précis et nous donne des conseils qui lui tiennent particulièrement à cœur comme éviter au maximum les adverbes ou le style passif. Des recommandations avec lesquelles je suis assez d’accord, même si je les suis rarement ! Ce n’est pas du temps perdu que de les lire.

De plus, lire du Stephen King, c’est très facile, même dans ce livre à part, plus technique et théorique que fantastique et fictionnel. Grâce à des comparaisons bien trouvés, des témoignages placés au bon moment et des exemples, il arrive à nous convaincre et à nous faire comprendre les petites choses importantes qui font un écrivain. Écriture est vraiment à la portée de tous, toutefois, lui-même le rappelle, ce livre ne fera pas d’un quidam un auteur de best-seller en un jour. Il le répète à plusieurs reprises, et il a complètement raison : pour écrire, il faut lire, lire, lire, lire et s’exercer !

 

Toutefois, moi qui baigne dans ce milieu de la création littéraire et dans le creative writing qui commence à peine à pointer le bout de son nez en France, je peux vous dire que ce livre n’est pas suffisant. Certes il apporte un regard nouveau, il met en avant des choses auxquelles on n’aurait sûrement pas pensé… Mais pour avoir une vision d’ensemble de l’écriture, des méthodes, des consignes, des conseils, il faut d’abord patauger dans d’autres œuvres de fictions, dans d’autres genres, il faut aller regarder ce que d’autres ont pu écrire sur l’écriture, il faut aller à la rencontre des auteurs, il faut voir en quoi consiste un atelier d’écriture, et surtout il faut avoir la passion. En comparaison à d’autres œuvres sur l’écriture, ce livre est presque pauvre : pas complet sur le plan pratique, concret, peu séduisant du point de vue des confidences, du côté autobiographique qui partagerait avec nous le destin d’un écrivain.

Bref, il m’a laissé sur les lèvres un goût de thé trop infusé : pas mauvais, bon même dans la bouche des néophytes mais peut faire mieux.

Stephen King, Écriture, mémoires d’un métier, traduit de l’anglais (États-Unis) par William Olivier Desmond, chez Albin Michel, 20€15, OU chez Le Livre de Poche, 6€60.

Ciseaux, de Stéphane Michaka

En ce moment, je lis beaucoup de livres (romans, essais) traitant de l’écriture ou de l’écrivain. Aujourd’hui, j’ai choisi de vous en présenter un qui évoque en plus l’éditeur, et sa relation à l’auteur. Connaissez-vous Raymond Carver ? C’est un nouvelliste américain, décédé en 1988. Ce n’est pas celui qui a écrit le roman dont je vais vous parler, mais il en constitue la matière première. Un appendice en début du livre nous précise qu’il s’agit bien ici d’une œuvre de fiction, cependant des éléments importants de la vie de Carver s’y retrouve : sa première femme, son alcoolisme, sa liaison avec une poétesse. Cela me rappelle un autre roman que j’ai lu il y a quelques mois et qui, lui aussi, traitait de façon fictionnel la vie d’un écrivain bien réel. Mais aucune des fictions mentionnées dans ce roman n’existent en dehors de celui-ci.

Le roman en question se nomme Ciseaux, et a été écrit par Stéphane Michaka. On y suit la progression de Raymond, un écrivain, qui essaie tant bien que mal de finir des nouvelles et de les faire publier. L’amour désabusé qu’il entretient avec sa femme Marianne, qui lui a tout sacrifié, est renforcé par sa consommation un peu trop élevée et régulière d’alcool. Raymond sait qu’il devrait arrêté, mais il n’a pas la motivation suffisante.

ciseaux

Un jour, une des ses nouvelles est remarquée par un magazine. Cependant, l’éditeur, Douglas, qui s’en occupe, veut effectuer de gros changements : il coupe de façon radicale de nombreux passages, rend la nouvelle hachée menue, en change son titre. Raymond acquiesce, c’est la seule solution pour connaître la publication et il a vraiment besoin d’argent. Le succès est là, alors il continue d’écrire des histoires qui seront charcutées « pour la bonne cause » par cet éditeur caressant. Mais Marianne, qui est très impliquée dans la vie d’écrivain de son mari, soulève cette dénaturation de ses nouvelles, qui ne sont plus les siennes, mais celles de « Ciseaux », le surnom de Douglas. Alors Raymond essaie de faire entendre sa voix, mais c’est dur quand on lui promet l’édition d’un recueil entier constitué exclusivement de ses nouvelles et qu’on lui trouve un poste de professeur dans une bonne fac….

La construction de cet ouvrage est assez atypique. Comme dans une pièce de théâtre ou un scénario, le nom d’un des personnages entame diverses petites parties : monologues ou narration du point de vue de ce personnage. Cela permet de savoir ce que peuvent ressentir Raymond mais aussi Douglas par exemple. Ce peut également être une lettre qu’ils écrivent à l’autre, voire, la partie peut concerner deux personnages, c’est alors une tranche de vie qui leur est commune qui nous est racontée. On peut difficilement faire plus claire comme structure, pratique pour une lectrice qui se perd facilement comme moi, et cela a l’avantage de multiplier les points de vue. Mais, cela ne perd pas pour autant toute la saveur romanesque de ce livre : c’est un combat entre plusieurs personnalités très distinctes, ce sont des années de vie de sacrifices et d’amours tumultueuses qui défilent.

Rajouter à cela la retranscription de plusieurs nouvelles de Raymond (le personnage et non le « vrai » nouvelliste) et le roman est alors complet. On ne peut pas parler de l’écriture de quelqu’un sans savoir ce qu’il écrit justement, et cela permet de mieux comprendre les coupes sauvages que se permet d’effectuer Douglas et leur importance. Ces nouvelles sont visuellement séparées du reste du texte par un changement de police : décidément tout est fait pour qu’on ne se perde pas dans ce livre ! En les lisant, on comprend les mécanismes d’écriture de Raymond qui prend comme point de départ pour écrire ses fictions sa propre vie et qui se laisse influencer par son état, ses émotions à chaque ligne. Ces nouvelles traitent de la vie personnelle, privée, intime et nous permet de mieux comprendre les propres événements qui jalonnent la vie de cet écrivain. N’ayant jamais lu quelque chose de Raymond Carver, j’ignore si le style des deux Raymond est assez proche, mais j’avoue que ce détail n’a aucune importance.

Ce n’est pas un roman très palpitant c’est vrai, mais on se laisse facilement bercé par les aventures de cet écrivain qui peine à se faire connaître. On peut par moment ressentir de la pitié pour ce héros qui est par moment aveugle à ce qui se passe autour de lui, mais c’est un attachement timide pour lui qui prend vite la place de ce sentiment pathétique. Une lecture pas forcément reposante mais très agréable tout de même.

Stéphane Michaka, Ciseaux, aux éditions Fayard, 19€.

Inspiration, je t’aime, je te hais

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Depuis toujours, enfin depuis que nous nous exprimons, il nous a toujours été inculqué le principe d’inspiration. L’inspiration, on en a tous fait l’expérience. C’est le moment magique où une idée jaillit dans notre esprit, un petit sourire hésitant, un pincement au cœur, les mains qui nous démangent de coucher sur le papier ce que l’on a à dire. L’inspiration est devenu un mythe, un saint Graal, un topos de la littérature.

D’expérience, j’ai pu en tester plusieurs genres. Oui, car il y a des types d’inspiration, dont je vais gentiment vous donner la liste :

  • l’inspiration classique : la littérature d’aujourd’hui n’est que décadence. Votre projet est de la revaloriser, faire voir au monde ce dont une vraie plume est capable, grâce à cette parfaite maîtrise de la langue et à des sujets choisis avec soin.
  • l’inspiration du buzz : qui s’adresse plutôt aux textes journalistiques, aux essais. Vous pensez à un sujet d’actualité, de société : vous avez des tas de choses à dire, un point de vue qui tabasse, des révélations brûlantes, des conclusions époustouflantes. Grâce à vous, la face du monde va changer ! Vous apporterez un nouvel éclairage, une vérité dépoussiérée, vous ferez le buzz !
  • l’inspiration épopesque : pour ne pas dire épique. Ici, c’est le début d’une œuvre. Et, oh mon Dieu ! Quelle œuvre ! Quelque chose de grandiose, d’immense. À l’image de Proust, vous vous lancez corps et âme dans ce projet pharaonique, qui demande votre sueur, votre sang, le sacrifice d’une vie au bénéfice du reste de l’Humanité. Vous léguez votre génie, vous souhaitez la postérité, la gloire, la reconnaissance de votre travail acharné. Cette œuvre va révolutionner le monde de la littérature, vous n’en doutez pas.
  • l’inspiration poétique : vous vous sentez l’âme mélancolique, lyrique, vous souhaitez chanter les sentiments qui vous bouleversent, les péripéties de votre âme. Sous votre plume, les mots s’enchaînent avec grâce et rythme, que c’est bôôô….
  • l’inspiration pfouiit : celle-ci, nous en avons tous fait l’expérience. Vous venez de finir de lire un livre extraordinaire, de regardez un reportage sur le dernier succès en librairie, d’écouter une interview d’un auteur connu. Et là, c’est la drame ! Enfin, non, vous ne le savez pas encore. Doucement, vous vous levez, le regard lointain, vous vous adressez à votre mère/chien/conjoint(e) : « J’arrête tout, je veux être écrivain. » Sans écouter les exclamations étonnées, vous vous dirigez vers votre machine à écrire/cahier/ordinateur car « le changement, c’est matin »*… Vous profitez de ce petit moment de bonheur, où toute votre vie va bousculer. Vous étirez vos doigts, vous installez confortablement, prenez une grande inspiration et… rien. L’inspiration était là et pfouiit !

Je pense personnellement que l’inspiration n’est vraiment pas la solution sine qua non à l’écriture de plaisir. Écrire (et non bien écrire, ça, c’est autre chose) est avant tout une question d’imagination mais aussi de maîtrise de la grammaire, de la syntaxe, du vocabulaire sans qui il serait impossible d’exprimer ses idées. L’inspiration ne doit pas être élever au rang de légende au risque de bloquer la plume de certain : elle devient alors un outils de pression pouvant bloquer toute création. Le syndrome de la page blanche ne doit pas devenir rédhibitoire à une tentative d’écriture. Oui, l’angoisse de la page blanche est sûrement du à un manque d’inspiration mais ce n’est pas grave ! L’inspiration n’est que la clé pour démarrer le moteur, le coup de pouce pour cracher les premiers mots, le reste, c’est vous, uniquement vous et votre créativité. Un manque d’inspiration ne signifie pas notre nullité en matière d’écriture, juste un temps de pause dans notre imagination que l’on ne peut pas toujours forcée. Toutefois, il ne faut pas confondre inspiration et talent : le premier, tout le monde en fait l’expérience, le second n’est réservé qu’à quelques privilégiés ! Mais ça, nous le verrons plus tard…

* Je nie toute tentative de message subliminal.

Faites un petit tour plus bas pour voir le commentaire de Momo, très intéressant !