1976, JO de Montréal. Elle a quatorze ans, elle vient d’un pays qu’on ne sait pas situer sur une carte. Elle est là pour bouleverser les guerres, la gymnastique, les ordinateurs. Prestation terminée, elle regarde sa note : 1,00. Pourtant, elle a tout réalisé de façon parfaite. C’est là qu’elle voit le juge qui, tourné vers elle, dresse ses deux mains, les dix doigts levés et écartés. Ce n’est pas 1 sur 10, mais 10, la note maximale, la perfection encore jamais atteinte, une note qu’on ne croyait pas possible, à tel point que les ordinateurs n’étaient pas conçus pour l’afficher. Le monde entier la découvre et l’adule. Elle s’appelle Nadia Comaneci, on la surnomme la petite communiste qui ne souriait jamais.
Vous l’avez compris, je vais vous parler aujourd’hui du roman biographique de Lola Lafon qui a connu un joli petit succès il y a quelques semaines à sa sortie. J’ai eu l’occasion de le lire pour le Prix des Cinq Continents de la Francophonie, vu que ce livre en est candidat. Et disons que je ne m’attendais pas à lire ce genre de choses.
On explore la vie de cette gymnaste de ses débuts à son départ du pays, en passant par ses entraînements, sa relation avec son coach, les JO qui l’ont révélée, les compétitions suivantes, etc. Mais on ne s’arrête pas là puisque l’on découvre aussi sa famille, la réputation qu’a acquise très rapidement cette petite et sa vie sous la politique communiste. Cela est synonyme de galas et de discours pour le « Camarade » Ceausescu, de silence et de concentration extrême, de risques et de dangers à prendre pour être la meilleure. Comaneci est devenue une vraie icône, un modèle, au-delà de ce qu’on peut imaginer aujourd’hui. Elle avait une énorme pression sur les épaules, mais s’en rendait-elle compte ? Avec les années, la petite communiste change, et devient une femme, avec des formes : un descente aux enfers dans un corps qu’elle déteste, et pourtant elle reste sur les podiums.
Il est difficile d’être très claire, ce livre foisonne d’événements et de moments de vie : Nadia n’était pas juste une gymnaste douée, c’était une jeune fille mystérieuse, à la vie difficile. Elle a du faire des sacrifices, pourtant elle est contente de ce qu’elle a vécu.
Ce livre se divise en deux parties distinctes qui se succèdent presque à chaque chapitre. Il y a la narration, cette réalité réécrite, complétée s’il le faut par la fiction, et il y a ces passages en italique où l’auteure témoigne de sa relation avec Nadia Comaneci, relate certaines de leurs discussions par téléphone. On y découvre une femme complexe, fière de ce qu’elle a été, du chemin parcouru, mais toujours aussi secrète et humble.
J’ai été très partagée par ce livre. Après réflexion, je pense que j’ai aimé le sujet de ce roman : la vie très remplie d’une gymnaste fascinante dans un pays intrigant. Cette plongée dans le monde du sport (mais pas que) est vraiment bien réalisée et agréable à lire. J’ai beaucoup moins apprécier l’écriture de Lola Lafon, qui semble parfois artificielle. Certains passages ne me semblent pas assez travaillés. Il semblerait que là où elle se débrouille le mieux, c’est quand elle colle le plus à la réalité, quand elle revêt cet habit d’enquêtrice. Mais quand elle souhaite aller vers plus d’imaginaire, voire de poésie, c’est raté (j’ai en tête les toutes premières pages du livres où elle relate de façon absolument nébuleuse le premier 10 de Nadia.)
Cet avis n’est que le mien, mais c’est ainsi que j’ai ressenti les choses à la lecture de ce livre. Globalement, il est pourtant très intéressant et mérite qu’on y jette un coup d’oeil. Toutefois, aujourd’hui, c’est le personnage de Nadia que je retiens et non pas la plume de Lola.
Lola Lafon, La petite communiste qui ne souriait jamais, aux éditions Actes Sud, 21€.
EDIT : Désolée lecteur, j’ai mal fait mon boulot. J’ai complètement envoyé aux oubliettes l’avant-propos de ce roman, mon étourderie me perdra. En effet, comme me l’ont fait remarquer l’auteure sur Twitter et lilylit en commentaire, les échanges dont je fais mention dans ce billet, entre la narratrice et la gymnaste, sont fictifs. J’ai fait un peu trop vite l’amalgame entre narratrice et auteure, ça m’apprendra à ne pas faire attention. Mea culpa.