World War Z, de Max Brooks

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Avec un peu de retard – NaNoWriMo oblige –, je viens vous parler de la lecture commune de novembre. L’avant-dernière de l’année et je pense déjà à celles de l’année prochaine… Ce mois-ci, était au programme un livre atypique que je voulais découvrir depuis longtemps : World War Z de Max Brooks.

Vous le savez déjà, on va parler de zombie. Le monde a plongé dans l’apocalypse, un mal aussi incompréhensible que terrifiant a envahi littéralement la planète, ne laissant que peu d’espoir. Mais des hommes et des femmes se sont battus pour rester en vie, pour reprendre possession de leurs terres, pour faire survivre l’humanité, en dépit de la souffrance, des manques, de la peur. C’est cette histoire que va raconter le narrateur. Le mal est passé, on s’en relève à peine et il est censé écrire une sorte de rapport, de documentaire retraçant l’épidémie, des premiers cas à la Grande Panique, mais aussi les différents moyens qu’ont utilisés les états pour combattre ce mal, la façon dont le peuple a essayé de survivre. Les échecs cuisants, les conséquences qu’on n’imagine même pas, les îlots de civilisation partout dans le monde, les souffrances psychologiques, les secrets petits et grands…

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Pour cela, le narrateur va dans le monde entier et interviewe ceux qui ont vu, ceux qui ont vécu, ceux qui ont survécu. Il nous retranscrit cela directement sans filtre. Un témoignage poignant, fort.

Un témoignage fictionnel bien entendu. Un coup de maître de la part de l’auteur. Certains sont désarçonnés par ce livre vraiment à part, s’étant attendu à un roman de zombie on ne peut plus classique. Personnellement, je savais à quoi m’attendre et j’étais très curieuse de découvrir ce livre. Et autant dire que cela a super bien fonctionné sur moi. J’ai été passionnée, emballée dès les premières pages et je prenais un réel plaisir à me replonger chaque jour dans ces pages. Les chapitres, les interviews sont nombreuses et très très diverses, différentes. Du militaire au scientifique, de celle qui est devenu folle à l’ancien président, tout le monde est représenté. On ne s’ennuie pas un seul instant, on découvre la grande histoire de la Guerre des Z comme les témoignages plus personnels mais tout autant importants. Pas de redites, une progression chronologique toujours maîtrisée, des échos qui enrichissent la lecture. Rajoutez à cela l’imagination incroyable et vous obtenez un livre remarquable.

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Il est vrai que cette histoire est parfois un peu américano-centré mais tous les continents sont représentés. On voyage à travers le monde, s’effrayant de voir qu’aucun coin n’a été épargné. Du fond des océans, à la station spatiale, du Japon à Cuba… Il y a toute la détresse possible dans ce roman mais aussi de l’espoir. Car l’on sait que l’humanité a survécu. Des Victory Day sont fêtés, la fin officielle de cette guerre a été déclarée, mais tout le monde sait que le combat n’est pas fini. Les zombies sont en nombre encore et se relever de ce chaos va demander beaucoup de temps et d’effort. Le monde se réveille d’un cauchemar terrible et il garde les yeux bien ouverts, regardant vers l’avenir.

World War Z est une vraie pépite, une expérience de lecture inédite. Moi qui ne suis pas fan des histoires de zombie classique, là j’ai été conquise. Et vous ?

Retrouvez aussi les avis de L’Aléthiomètre et Lilylit.

Max Brooks, World War Z, Le Livre de Poche, 7€60.

A l’aide, ou le rapport W, d’Emmanuelle Heidsieck

Et si la gentillesse était un délit ? Emmanuelle Heidsieck imagine un monde où rendre service sans rien attendre en retour est interdit et dangereux.

A l’aide ou le rapport W nous évoque la rédaction de fameux dossier qui va radicalement changer l’image de la société et son fonctionnement. Donner un coup de main gratuitement est depuis longtemps devenu un signe d’inégalité, celui qui aide se plaçant en supérieur à celui qui est aidé. Pour plus de justice et d’équité, chaque service, conseil, aide doit être acheté auprès d’entreprises spécialisées pour éviter toute concurrence déloyale. C’est seulement ainsi qu’un pays capitaliste comme le nôtre peut réussir, en tout cas dans l’univers de ce roman.

L’écriture est âpre et difficile à suivre tellement elle est sèche. On est au-delà de l’émotionnel dans ce livre qui décrit une société effrayante et déshumanisé. C’est un livre court, et heureusement car le style comme le thème sont épuisants. Ce n’est pas simple d’affronter un monde où l’altruisme est un défaut inqualifiable.

A travers des « cas pratiques » et la relation hiérarchique entre les deux hommes du gouvernement qui rédigent le rapport remettant tout en question, les pages défilent avec heurts. Ce n’est pas l’écriture qui est à remettre en cause mais peut-être plus la construction et le choix de la voix narrative tellement extérieure au récit que l’on a du mal à s’y couler. Toutefois, il faut remarquer que cela colle bien au texte…

Une langue acerbe rend ce roman d’anticipation d’autant plus terrible : on pourrait presque croire que ce monde où l’aide à personne est une grave faute menant à d’importantes amendes et peines de prison est possible. Juste pour vivre cette expérience qui donne à réfléchir, tentez cette lecture.

Emmanuelle Heidsieck, A l’aide ou le rapport W, aux éditions Inculte Laureli, 14€90.

L’atelier des miracles, de Valérie Tong Cuong

Tout doucement, je réapparais sur ce blog après trois semaines de calme, avec peu d’articles. Mon rythme de lecture commence à revenir à la normale mais les billets vont se faire de plus en plus nombreux, comme avant.

Depuis quelques semaines ( mois ? je suis toujours la dernière à lire), la blogosphère et le Twitter littéraires sont agités par un livre qui fait des merveilles : L’atelier des miracles de Valérie Tong Cuong. Je ne pouvais pas échapper à ce raz-de-marée et j’ai donc cédé : je me suis procurée ce roman que j’ai dévorer en une journée.

C’est l’histoire croisée de trois personnages à un tournant dangereux de leur vie qui vont rencontrer Jean, le responsable de l’association pour personnes vulnérables, l’Atelier. A Monsieur Mike, ancien militaire qui crèche dans la rue, il va proposer un poste de responsable de la sécurité. A Mariette, une professeure d’histoire-géographie qui, à bout de nerfs, a mis une claque à un élève, il va l’aider à surmonter cette dépression profondément ancrée et aggravée par un mari député pas très conciliant. A Milie qui a souhaité devenir amnésique après un incendie pour changer de peau, il va lui permettre de se construire une autre vie et de devenir plus forte.

Dans cet Atelier, on fait des miracles paraît-il. Mariette commence à prendre sa vie en main, Milie trouve un très bon emploi, Monsieur Mike se sent utile. Ces trois personnages vont chacun à leur façon bouleverser cette association, quitte à en découvrir quelques côtés cachés.

Enfin un livre qui peut traiter de l’espoir et de la bonté d’âme sans être manichéen. Car un être humain ne peut pas être ou tout gentil, ou tout méchant. En chacun d’entres nous il y a un mélange subtil des deux, qui le plus souvent s’équilibre, même si parfois la balance penche plus d’un côté ou d’un autre. Jean est sur un fil sur lequel il se tient debout grâce à moult acrobaties. Ses protégés ont décidés grâce à lui de tourner la page et de se diriger vers autre chose, une nouvelle existence qui leur sera plus profitable. Mais ils ne devinent pas encore que des choses se trament sur le dos de leur revirement.

Un livre somptueusement écrit : chaque personnage a sa propre voix et les chapitres leur donne la parole à tour de rôle. De points de départ complètement différents, ils se retrouvent dans un même but qui va les rapprocher et les faire se rencontrer. C’est un livre qui se lit facilement mais dont le sujet n’en est pas moins intéressant et beau. Quand on termine la dernière page, on soupire d’aise : ce n’est pas une belle histoire, pas vraiment, mais cela nous redonne confiance en la vie, dans les hommes, car il faut continuer coûte que coûte à avancer, et affronter les difficultés. C’est un roman qui parle d’amour, de solidarité, de psychologie, d’entraide, d’affection.

L’atelier des miracles, c’est une petite pépite, un trésor qui reflète le visage de l’humanité, à avoir absolument dans sa bibliothèque !

Valérie Tong Cuong, L’atelier des miracles, aux éditions JC Lattès, 17€.