Everything Everything, de Nicola Yoon

Je crois que je me lasse de la littérature young-adut. C’est ce que je me dis à la suite de cette lecture : il y a quelques semaines, j’aurais eu un vrai coup de cœur pour ce roman, mais aujourd’hui, je l’ai juste apprécié, voyant ses faiblesses et ses limites. Zoom sur Everything Everything de Nicola Yoon.

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Madeline est atteinte de la maladie de l’enfant-bulle : elle est allergique au monde, obligée de rester chez elle, où l’air est filtré et tout désinfecté. Un quotidien un peu routinier qu’elle partage avec sa mère et son infirmière seulement : les cours par correspondance, la vie sur le net, les lectures, les jeux de sociétés, les films… Mais un jour, dans la maison d’en face, une famille s’installe. Maddie comprend tout de suite qu’un truc cloche dans cette famille : le père hurle sans cesse, la mère a l’air désespéré et l’aîné, un beau brun qui escalade les murs et les toits, a l’air en colère. Quand il prend contact avec elle par fenêtres interposées, Maddie sait qu’elle ferait mieux de l’ignorer. Et elle sait aussi qu’elle n’en fera rien et qu’elle tombera sûrement amoureuse de lui

Car oui, c’est inévitable parce qu’il s’agit bien sûr ici d’une romance, et que le lecteur – moi la première – n’attend que ça ! Mais comment vivre l’adolescence et les affres de l’amour quand on ne peut pas sortir de chez soi et encore moins rencontrer, toucher quelqu’un ? J’ai beaucoup apprécié cette histoire qui a réussi à me surprendre à chaque chapitre. Les événements s’enchaînent très vite – ça en paraît presque surréaliste de facilité parfois. Les différents moyens de narration, les chapitres courts rendent toute cette histoire très attractive et on ne lâche plus le bouquin… Vous pensiez savoir comment cela finirait ? Vous êtes tellement loin du compte ! Même si, avec mon regard d’adulte et de grand lecteur, j’avais deviné la fin assez tôt, je me doute que beaucoup se sont faits bernés.

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Ce roman aborde ou frôle des thématiques difficiles (le deuil, la violence au sein de la famille, la dépression, la maladie, la solitude…), et j’aurais vraiment souhait que l’auteur soit plus bavard, apporte plus de pages, d’approfondissements à son intrigue. Clairement, avec des personnages si attachants, il aura pu se le permettre.

Car c’est ça également la grande force de ce livre – comme dans beaucoup de young-adult – : ses personnages principaux donnent envie de les suivre, ils sont incarnés, ils ont une vraie psychologie, ils évoluent. Ce sont de vrais ados, un peu fougueux, pas sûrs de ce qu’ils veulent mais qui foncent… J’ai été émue, j’ai ri, j’ai eu peur pour eux.

Une très bonne histoire, même si elle avait clairement plus à donner. Je vous la recommande !

Nicola Yoon, Everything Everything, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Eric Chevreau, aux éditions Bayard, 16€90.

Le sommeil n’est pas un lieu sûr, de Louis Wiart

Le sommeil n’est pas un lieu sûr de Louis Wiart est un livre absolument bouleversant, terrible, pervers, il rend fou. On suit la narratrice dans son quotidien qui est mis sens dessus dessous par des troubles du sommeil inhabituels et terrifiants. Elle a cette impression d’entendre une voix quand elle est couchée dans le noir, une voix méchante qui l’insulte, la menace, la torture. De plus en plus anxieuse, apeurée, épuisée, elle se pose de nombreuses questions : pourquoi cela cesse-t-il soudain quand son mari part en voyage d’affaires ? Ce dernier, sous ses aspects prévenants, calmes, est-il vraiment ce qu’il prétend être en apparence ? Au fur et à mesure des nuits, la jeune femme sent de plus en plus sous l’emprise de son époux sur elle et les sentiments qu’elle éprouve pour cet homme deviennent ambigües. Une tension grandissante fait jaillir la violence et la paranoïa. Descente psychologique aux enfers, ou vrai danger : ce suspens et ce climat qui se dégrade petit à petit rendent le lecteur accro.

J’ai lu ce livre d’une traite, juste avant de me coucher et c’était là une bien mauvaise idée. Ce roman prend aux tripes et ne nous laisse pas tranquilles, même une fois la lecture terminée. L’auteur a un talent indéniable pour nous emmener là où il veut, et même dans des endroits et des situations qu’on ne veut pas vivre ou lire. Mais on le fait quand même, car on ne peut pas abandonner l’héroïne à son sort et, comme elle, on veut savoir. Le rythme est mené tambour battant, des chapitres courts rendent l’action très attractive et facile à suivre. Les dialogues mériteraient une vraie mise en page pour les rendre plus clairs mais ce qu’ils dévoilent d’indices nous rend tellement dépendant qu’on leur pardonne cette maladresse. Le titre prend tout son sens très vite et le lecteur est mis mal à l’aise dès les premières pages.

Ce roman est une vraie réussite, j’ai été très emballée par l’effet qu’il a eu sur moi : j’ai vécu avec l’héroïne, j’ai été l’héroïne, j’ai eu ses doutes et… son insomnie ! La plume sans faille et sans détour de Louis Wiart a réussi ce tour de maître qu’est de créer la peur à la lecture, et pas la simple frayeur, mais la peur pour la vie, celle qui prend au ventre. Mon cœur s’est emballé à certaines lignes, quand le danger se rapprochait, quand une révélation venait tout bouleverser. Pour un premier roman, on peut dire qu’on a ici un petit chef-d’œuvre. Une livre à lire au creux de son lit le soir pour plus d’effet.

 

Louis Wiart, Le sommeil n’est pas un lieu sûr, aux éditions Les impressions nouvelles, 10€.

Betseller, de Jesse Kellerman

Vous voulez un livre vraiment surprenant et qu’on ne peut pas lâcher ? Je crois que j’ai ce qu’il vous faut : Bestseller de Jesse Kellerman.

 

Arthur Pfefferkorn est un écrivain. Enfin, il l’était, il n’a plus rien publié depuis des années et sa plume est sèche. A l’inverse, son ami (un peu éloigné maintenant) est William de Nerval qui enchaîne bestseller sur bestseller alors que rien ne le prédestinait à cette carrière. Mais un jour, l’auteur renommé et tant jalousé disparaît en pleine mer laissant derrière lui un manuscrit bien avancé et une veuve à réconforter. Arthur ne peut s’empêcher de faire main basse sur les ruines du passé de son vieil ami. Mais il n’a pas encore conscience que son acte va avoir des répercussions bien plus retentissantes qu’un simple plagiat : succès, danger, espionnage, peur, mort, amour, secret et révolution, voici les ingrédients stupéfiants, surprenants qui vont constituer le quotidien d’Arthur, qui en sera le premier étonné.

 

Je ne peux pas vous en dévoiler plus sans gâcher toute l’histoire. Il y a un côté polar bien prononcé dans la construction de ce roman qui nous emmène bien plus loin que ce qu’on aurait pu imaginer. Presque 400 pages où l’on se fait ballader sans s’en rendre compte, tellement on est pris dans cette histoire rocambolesque mais maniée d’une main habile. Ce n’est pas dramatique ou loufoque mais ce roman contient la juste dose d’humour noir qu’il faut pour trouver ces situations drôles et dangereuses à la foi. Beaucoup de dialogues, mais aussi des réflexions intérieures et une narration menée d’une main de maître : l’écriture est au service d’un traitement romanesque qui refuse de se plier aux règles d’un genre mais veut les mêler pour en extraire le meilleur, nous faire vibrer, nous faire rire, créer du suspens. Un beau mélange, réussi, que je vous conseille !

 

Jesse Kellerman, Bestseller, éditions des Deux Terres, 21€50.

La maison des miroirs, de John Connolly

Pocket a sorti de nouveaux petits livres, des romans voire même parfois des récits qui s’apparentent plus à la nouvelle, et cela au prix de 2€90. C’est un peu plus cher évidemment que les folio à 2€ mais je trouve que le choix est plus agréable.

Aujourd’hui, j’ai donc choisi l’un deux : La maison des miroirs de John Connolly. Je ne suis pas très roman policier mais je sais d’expérience que j’aurais tord de les bannir complètement de mes lectures. Connolly étant une valeur sûre paraît-il, j’ai décidé de le lire. En plus, ce texte me permet de rencontrer un de ses personnages phares : le détective Charlie Parker.

Il y a des années, un certain John Grady a tué quatre enfants dans sa maison isolée. Une demeure étrange, empuantie par de la colle à tapisserie fabriqué par l’assassin et envahie de miroirs, présents sur chaque mur. Matheson est, enfin était, le père d’un des enfants qui ont perdu la vie à cause de ce fou. Il a racheté le domaine de Grady pour ne pas détruire ce dernier lieu qui a vu sa fille vivante. Mais un jour, il découvre une photographie d’une enfant jouant au base-ball, posée au milieu de la maison.

Il embauche alors le privé Charlie Parker pour enquêter sur ce phénomène étrange : retrouver cette gamine sur la photo et surveiller la maison de Grady qui se révélera bien plus perturbante encore qu’elle n’en a l’air. Mais un homme inquiétant approche le détective pour venir chercher une « dette » dans la maison du meurtrier. Très vite appelé « le Collectionneur », il est sûrement l’être le plus mystérieux en rapport avec cette enquête.

J’ai beaucoup apprécié ce livre, sûrement parce qu’il n’était pas très long. En effet, il s’agit quand même là d’une enquête et lire ce genre de choses… ce n’est vraiment pas ma tasse de thé. Le fait qu’on suive un détective privé et non un vrai policier est plus agréable je trouve, il est plus libre de ses mouvements. Et, mon Dieu, que ça fait du bien de découvrir un personnage qui joue ce rôle sans être un dépressif ou une vrai caricature comme on en voit si souvent. Pas de flic reconverti au-dessus des règles, pas de violence gratuite, pas d’amourette, non juste un mec bientôt papa qui est enquêteur, point barre. C’est vraiment très agréable de découvrir que Charlie Parker en plus d’avoir de la jugeote est un être humain qui peut ressentir la peur, au lieu de sortir son flingue au moins bruit.

L’écriture est vraiment très fluide, avec beaucoup de dialogue. Il n’y a pas de longueurs ou de digressions qui seraient frustrantes dans ce genre de livre. La traduction française est sans anicroche. Quant à l’histoire, elle brasse plusieurs tenants et aboutissants, on pourrait presque dire qu’il y a plusieurs intrigues mais finalement, elles se rejoignent toutes dans cet endroit sombre et dangereux qu’est la maison de Grady.

Ce petit roman se lit vite et ne se lâche pas ! Il est idéal pour entrer en douceur dans le monde des enquêteurs et sa fin vraiment surprenante est effrayante à souhait. Une jolie petite découverte qui me pousserait même à lire une autre œuvre de Connolly

John Connolly, La maison des miroirs, traduction de l’anglais par Didier Sénecal, Pocket (15336), 2€90.

Avant d’aller dormir, de S. J. Watson

Depuis sa sortie, je rongeais mon frein, j’étais frustrée de ne pas avoir encore eu l’occasion de lire ce livre. Alors dès sa sortie en poche, je lui ai sauté dessus, même si je n’ai pas pu le dévorer tout de suite. Cessons le suspens à deux francs six sous, je veux vous parler aujourd’hui de la révélation S. J. Watson et de son roman Avant d’aller dormir.

Il s’agit d’un thriller, alors autant vous dire qu’il fallait qu’il soit vraiment alléchant pour m’attirer car ce n’est pas ma littérature favorite. Son grand atout a été de ne pas se passer dans un cadre policier, ce n’est pas un récit de fuite ou d’enquête. C’est plutôt rare et ça ne pouvait qu’attiser ma curiosité.

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L’histoire, c’est celle de Christine, une femme de quarante-sept ans mais qui pense en faire vingt ans de mois. En effet, chaque matin, elle se réveille sans souvenir. Pour elle, elle est étudiante ou adolescente, cela varie et chaque jour, c’est la surprise, le désarroi. Elle se retrouve dans un lit qu’elle ne reconnaît pas, dans une maison qui ne lui dit rien, auprès d’un inconnu qui doit alors lui expliquer qu’elle est amnésique et que lui, c’est Ben, son mari.

La tête dans le brouillard, une fois cet homme parti au travail, elle reçoit un coup de téléphone d’un certain docteur Nash, il lui explique que depuis quelques jours et malgré son amnésie, elle tient en secret de son mari un journal qu’elle remplit chaque jour, un procédé mis en place pour améliorer sa mémoire. Mais une fois qu’elle l’a entre les mains, la première phrase l’intrigue : « Ne pas faire confiance à Ben ». Et plus elle avance dans la lecture, plus elle découvre son passé à travers des souvenirs qui ont parfois resurgi, elle se refonde une identité mais met également au jour quelques incohérences, des mensonges, des secrets qui mis bout à bout dans son journal, soulèvent beaucoup de questions douteuses à propos de ce fameux Ben.

Christine comprend qu’on lui cache des choses, peut-être vitales. Et elle veut tout savoir.

Le roman est bien construit avec un début et une fin narrés par l’héroïne, le reste de l’œuvre est en fait constitué du journal en lui-même. Son style très littéraire est expliqué par la vocation d’auteure de Christine, ce qui est plutôt bien trouvé ! Et même si chaque matin c’est pour elle la même surprise, le journal n’en est pas pour autant redondant, un bon point donc, car c’était là ma plus grande crainte.

On est vite entraîné dans la vie de cette femme, et comme elle on veut connaître le fin mot de l’histoire. Dans la dernière partie de livre, les choses s’accélèrent et c’est seulement à ce moment-là qu’on peut dire que le livre est haletant. Il y a du suspens dans le reste de l’œuvre, c’est vrai, mais ça reste assez gentillet, assez doux. Parfois, on s’égare dans des petites péripéties annexes qui peuvent polluer le fil conducteur de l’histoire, et il y a même quelques longueurs. Disons que c’est un thriller pépère, mais qui n’en reste pas moins intéressant et divertissant à lire.

L’écriture est de qualité, la psychologie des personnages est très bien développée, bref, ce n’est pas pour rien que ce roman était en tête des ventes à sa sortie ! Je vous le conseille, sauf si vous êtes vraiment accro au suspens à n’en plus pouvoir, car là, il risque de vous décevoir un peu.

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S. J. Watson, Avant d’aller dormir, traduction de l’anglais par Sophie Aslanides, aux éditions Pocket (14849), 7€60.

Lu dans le cadre des challenges « Destination : PAL » chez Lili Galipette et « Thrillers et Polars » chez Liliba.