Pas à vendre, d’Enzo Cormann

Je ne connaissais pas Enzo Cormann avant ma lecture de son dernier roman Pas à vendre. Pourtant il a plusieurs facettes : maître de conf’, « jazz poet », homme de théâtre. J’ai été très étonnée par son livre, tout à fait surprenant.

Le héros de ce livre s’appelle Paco Liebsman dit Sam Nibel. C’est un immense traducteur de polar, mais alors qu’il arrive à sa centième traduction, il ne voit plus l’intérêt de vivre, et veut se suicider. Mais avant cela, il va voir une dernière fois Sibylle, une escort girl qu’il rencontre depuis plusieurs mois, avec laquelle il a paradoxalement lié une relation sentimentale dénouée de tout sentiment. Un lien étrange les unit, peut-être le dernier filament qui le retienne à la vie. Sibylle fait bien son travail, mais ce qui plaît le plus à notre personnage, c’est qu’elle est aussi étudiante en philosophie, pragmatique, intelligente, cultivée en plus d’être belle.

C’est un roman assez dérangeant, assez tragique (il frôle le cliché du dépressif, mais n’y tombe pas!) car on est véritablement dans la tête du personnage. Ses visions, ses souvenirs, ses réflexions, des pensées parfois décousues, des allers-retours dans le temps, des dialogues qui vont à l’essentiel et une ponctuation toute personnelle. En effet, le roman n’est qu’une longue et immense phrase, mais cela ne dérange nullement. Au contraire, on trouve ce choix plus que justifié : cela nous pousse à vouloir tout lire, jusqu’au bout. Car on sent la fin proche et on veut absolument savoir comment elle sera.

Je ne sais pas si j’ai aimé ce livre, mais ce roman – divertissant – m’a ébranlée, et j’ai été interpellé par ce personnage qu’on connaît sans vraiment le connaître. Je vous invite à découvrir cette petite curiosité !

Enzo Cormann, Pas à vendre, éditions Gallimard, 15€50.

Avant d’aller dormir, de S. J. Watson

Depuis sa sortie, je rongeais mon frein, j’étais frustrée de ne pas avoir encore eu l’occasion de lire ce livre. Alors dès sa sortie en poche, je lui ai sauté dessus, même si je n’ai pas pu le dévorer tout de suite. Cessons le suspens à deux francs six sous, je veux vous parler aujourd’hui de la révélation S. J. Watson et de son roman Avant d’aller dormir.

Il s’agit d’un thriller, alors autant vous dire qu’il fallait qu’il soit vraiment alléchant pour m’attirer car ce n’est pas ma littérature favorite. Son grand atout a été de ne pas se passer dans un cadre policier, ce n’est pas un récit de fuite ou d’enquête. C’est plutôt rare et ça ne pouvait qu’attiser ma curiosité.

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L’histoire, c’est celle de Christine, une femme de quarante-sept ans mais qui pense en faire vingt ans de mois. En effet, chaque matin, elle se réveille sans souvenir. Pour elle, elle est étudiante ou adolescente, cela varie et chaque jour, c’est la surprise, le désarroi. Elle se retrouve dans un lit qu’elle ne reconnaît pas, dans une maison qui ne lui dit rien, auprès d’un inconnu qui doit alors lui expliquer qu’elle est amnésique et que lui, c’est Ben, son mari.

La tête dans le brouillard, une fois cet homme parti au travail, elle reçoit un coup de téléphone d’un certain docteur Nash, il lui explique que depuis quelques jours et malgré son amnésie, elle tient en secret de son mari un journal qu’elle remplit chaque jour, un procédé mis en place pour améliorer sa mémoire. Mais une fois qu’elle l’a entre les mains, la première phrase l’intrigue : « Ne pas faire confiance à Ben ». Et plus elle avance dans la lecture, plus elle découvre son passé à travers des souvenirs qui ont parfois resurgi, elle se refonde une identité mais met également au jour quelques incohérences, des mensonges, des secrets qui mis bout à bout dans son journal, soulèvent beaucoup de questions douteuses à propos de ce fameux Ben.

Christine comprend qu’on lui cache des choses, peut-être vitales. Et elle veut tout savoir.

Le roman est bien construit avec un début et une fin narrés par l’héroïne, le reste de l’œuvre est en fait constitué du journal en lui-même. Son style très littéraire est expliqué par la vocation d’auteure de Christine, ce qui est plutôt bien trouvé ! Et même si chaque matin c’est pour elle la même surprise, le journal n’en est pas pour autant redondant, un bon point donc, car c’était là ma plus grande crainte.

On est vite entraîné dans la vie de cette femme, et comme elle on veut connaître le fin mot de l’histoire. Dans la dernière partie de livre, les choses s’accélèrent et c’est seulement à ce moment-là qu’on peut dire que le livre est haletant. Il y a du suspens dans le reste de l’œuvre, c’est vrai, mais ça reste assez gentillet, assez doux. Parfois, on s’égare dans des petites péripéties annexes qui peuvent polluer le fil conducteur de l’histoire, et il y a même quelques longueurs. Disons que c’est un thriller pépère, mais qui n’en reste pas moins intéressant et divertissant à lire.

L’écriture est de qualité, la psychologie des personnages est très bien développée, bref, ce n’est pas pour rien que ce roman était en tête des ventes à sa sortie ! Je vous le conseille, sauf si vous êtes vraiment accro au suspens à n’en plus pouvoir, car là, il risque de vous décevoir un peu.

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S. J. Watson, Avant d’aller dormir, traduction de l’anglais par Sophie Aslanides, aux éditions Pocket (14849), 7€60.

Lu dans le cadre des challenges « Destination : PAL » chez Lili Galipette et « Thrillers et Polars » chez Liliba.